Une Histoire sur http://revebebe.free.fr/
n° 15495Fiche technique52948 caractères52948
9223
Temps de lecture estimé : 37 mn
23/02/13
corrigé 10/06/21
Résumé:  L'inspecteur Pauvert interroge différents protagonistes pour tenter de découvrir la vérité sur le double meurtre de Saint-Amant. Claire se rend chez Anita et lui confie son malaise.
Critères:  #nonérotique #policier #sorcellerie #romantisme #premiersémois fh uniforme bizarre campagne fsoumise hdomine vengeance
Auteur : Musea            Envoi mini-message

Série : Les sorcières de Saint Amant

Chapitre 26
Confrontations

Résumé des épisodes précédents :


Après avoir tenté de violer Claire Dupuy, le jeune comte Olivier Desgrange s’est caché dans une ancienne mine et, pour qu’on le croie mort, a fait brûler sa voiture dans laquelle il a mis le corps de l’avocat Marc Audebert qu’il venait d’assassiner. Grâce à des rituels de magie noire, il veut toujours posséder Claire, dont il est follement amoureux. Mais elle est protégée par son fiancé le luthier Louis Bergheaud, initié en magie blanche, la bonne magie.


Le policier Pauvert qui examine le cadavre n’est pas absolument convaincu de son identité mais en arrive quand même à presque suspecter Louis et Claire. Louis se justifie et fait publier les bans en vue du mariage. Marthe Rougier, initiée en magie noire, tue Marie Latour, une sorcière blanche qui protégeait Claire et innocente le comte Olivier Desgrange auprès de sa mère qui le croit mort alors que celui-ci renouvelle ses maléfices, toujours dans le même but : que Claire se donne à lui. Il rôde près de sa ferme, enflamme une meule de paille et, parvenu par artifice dans la chambre de la jeune fille, la soumet à se donner du plaisir sous ses yeux. Ni Louis ni les policiers présents dans la cuisine n’ont pu la protéger car ils étaient étrangement endormis.


Claire se rend compte qu’elle a été envoutée et pense que le sorcier n’est peut-être pas mort. Louis la conforte dans cette opinion en lui racontant les évènements de la nuit et veut la convaincre qu’il doit user de magie, lui aussi, pour la protéger. Elle se montre très réticente : la magie, même blanche, est dangereuse !


Le père de Marc Audebert s’inquiète de la disparition de son fils. L’hôtelier lui conseille de prévenir la gendarmerie d’Ambert. Cette dernière apprend en outre la disparition de Marthe Rougier, qui a rendu visite à Olivier dans sa cachette pour lui confier qu’elle est en train de perdre une partie de ses pouvoirs de magie noire et qu’elle craint d’être arrêtée pour le meurtre de Marie Latour. Olivier lui annonce que, par magie, il va initier Claire à de nouveaux plaisirs, si bien qu’elle se donnera à lui très prochainement, sans pouvoir lui opposer la moindre résistance.


Claire veut confier son désarroi à Anita, sa meilleure amie.




ooooOOOOoooo




Claire avait eu du mal à convaincre Louis de la laisser aller seule chez Anita. Aussi, pour rassurer complètement son fiancé, elle lui avait proposé de la déposer en voiture chez son amie et de venir la rechercher en fin d’après-midi. Le luthier avait accepté non sans réticence. Bien que sachant que la jeune fille ne risquait rien chez les Fabre, il n’était pas tranquille. Il sentait chez Claire un mal-être profond depuis son malaise de la veille. Pire, le baiser qu’il avait échangé avec elle lui avait donné l’impression que sa fiancée lui cachait quelque chose. Aussi pria-t-il mentalement pour que cette rencontre avec Anita détende suffisamment Claire pour qu’enfin elle puisse s’ouvrir à lui un peu plus tard de ses inquiétudes.


Pauvert n’avait pas reparu depuis la fin de la matinée. Cabet et Charpin voulaient veiller sur la maison et sur le père Bideau, lui aussi potentiellement menacé par ses révélations et son témoignage dans le meurtre de Marie Latour. Louis prit donc la voiture des deux policiers pour emmener Claire au hameau du Verdier. Voyant que la jeune fille portait la boîte de la mercière de Brioude, il sourit :



Claire hocha la tête tristement. Vu comme cela, l’avenir semblait si sûr, si apaisé et apaisant… Mais pouvaient-ils encore prétendre à cette vie sereine après tout ce qui s’était passé la nuit dernière ? La jeune femme en doutait. Desgrange n’en resterait pas à une seule nuit de tourments et de sortilèges contre eux. Il tenterait à nouveau quelque chose. Elle en était quasi certaine.


Assise dans la voiture noire des deux policiers, Claire réfléchissait à ce qu’elle allait dire à Anita. Jusqu’à présent, son amie avait toujours été de bon conseil et c’était grâce à elle qu’elle avait pu rencontrer et aimer Louis. Peut-être saurait-elle lui montrer quoi faire pour contrer Desgrange.

Alors que la voiture s’arrêtait devant la cour de la maison des Fabre, Louis se tourna vers sa fiancée et lui dit tendrement :



Après un dernier baiser, Louis repartit. Il comptait passer à Saint-Amant Roche Savine voir si Pauvert avait avancé dans son enquête. Lorsqu’il arriva sur la place du village, une foule s’était rassemblée devant l’annexe de la mairie. Et lorsqu’il s’avança, il fut surpris de voir le curé, ainsi que le maire, faire le forcing auprès des deux gendarmes en faction.



Mais les gendarmes furent inflexibles :



Cette tirade lapidaire provoqua un remous dans la foule massée devant le bâtiment municipal. Qu’avait donc fait Marthe Rougier pour avoir droit à un interrogatoire sans témoins ? Louis agrippa le bras du menuisier et lui demanda à brûle-pourpoint :



Au son de la voix de Louis, le maire Bernard Legrand s’était retourné et considéra le luthier avec colère :



Le luthier éclata de rire.





ooooOOOOoooo




Pendant que Louis était en train de discourir au-dehors, à l’annexe de la mairie, Marthe Rougier vivait un premier interrogatoire extrêmement pointilleux. Marius Pauvert, qui l’avait fait arrêter quelques heures plus tôt par les gendarmes d’Ambert partis à sa recherche, avait vite perçu le côté fourbe et manipulateur de la vieille dame. Aussi, chaque fois qu’elle tentait de détourner le sujet de conversation, la ramenait-il à la nuit du 14 juillet où elle avait été vue à l’hospice, quelques minutes avant le meurtre de Marie Latour.



Marthe sourit.



Marthe tenta d’ébaucher un sourire mais ce dernier était presque grimaçant. Voyant qu’elle ne pourrait pas cacher l’inimitié qu’elle éprouvait envers la mère de Claire, elle avoua :



La vieille femme parut agacée. Elle opposa à Marius Pauvert un regard glacé et s’empressa de répondre :



Marthe éclata de rire :



Marthe Rougier sourit.



La vieille femme sursauta en entendant ces paroles :



Pauvert se mit à rire.



Surprise par cette attaque, Marthe fixa l’inspecteur d’un air hagard avant de bredouiller :



Devant cette tentative de défense, Pauvert eut un petit rire :



Pauvert sourit :



Et s’adressant à un gendarme :



Marthe Rougier était furieuse. Elle se sentait prise au piège de sa propre parole. Pauvert, c’était sûr, en savait plus long sur elle qu’elle ne l’avait pensé et il avait trop de culture sur la magie pour croire ce qu’elle pourrait lui dire désormais. Intérieurement, elle se maudit de n’avoir pas identifié plus tôt cette menace. À présent qu’elle était arrêtée pour le meurtre de Marie, il n’était plus temps de jeter un sort sur cet homme… d’autant qu’il semblait sinon être protégé, du moins suffisamment initié pour savoir comment renvoyer un maléfice. Il fallait qu’elle trouve un moyen de se sortir de ce guêpier… Il lui fallait prévenir Olivier. Marthe voulait bien payer pour son crime, mais pas que son œuvre soit détruite par un inspecteur de police. Elle blêmit et d’une voix hachée par l’émotion et la colère, elle s’exclama :





ooooOOOOoooo




Claire trouva Anita dans sa chambre en train de lire un roman de Dyvonne qu’elle avait emprunté à la bibliothèque : Les Fiancés d’Angkor. Émue par les aventures de Lien et de Sihn, Anita fut à peine troublée par l’arrivée de Claire. Les yeux sur son livre, elle demanda :



Un instant après, Anita émergea de sa lecture soulagée et visiblement heureuse de cette visite impromptue de Claire.



À cette nouvelle, Anita se leva d’un bond, poussa un cri joyeux et sauta au cou de son amie en l’embrassant sur les deux joues, puis elle lui dit avec émotion :



Claire fit la grimace :



Alors, face à l’étonnement d’Anita, Claire lui raconta, les larmes aux yeux, le drame qui s’était déroulé. Au fur et à mesure qu’elle parlait, le visage d’Anita perdait de sa couleur rosée et lorsque Claire eut terminé son récit, elle se mit à trembler.



Anita soupira et prit un air triste avant de répondre :



La jeune fermière sourit tristement.



En disant cela, Claire avait pris les mains d’Anita, qui la serra contre elle comme si elle pouvait la protéger.



Anita sursauta de surprise à cette nouvelle.



Un bruit de pas grimpant l’escalier vint interrompre les jeunes filles. La porte de la chambre s’ouvrit et le visage de M. Fabre, grave et fermé, apparut :



Cette dernière se leva et suivit son père au rez-de-chaussée de la maison. En bas, Marius l’attendait devant un café. Il semblait soucieux. Il sourit vaguement à la jeune fille lorsqu’elle s’avança, lui désigna une chaise de paille et démarra son interrogatoire :



La jeune fille rougit. Avouer devant ses parents son escapade avec un avocat clermontois risquait d’alourdir son cas…



Anita fronça les sourcils. Marius Pauvert avait haussé le ton et la jeune fille perçut une jalousie qui ne disait pas son nom.



L’inspecteur sourit. Il tapotait doucement sur le bois de la table en signe d’agacement puis, tout de go, il ironisa :



Piquée au vif, Anita fixa Pauvert dans les yeux et répondit d’un ton rageur :



Anita hésita. Elle était partagée entre dire à Pauvert qu’elle et Marc avaient vu Desgrange, mais aussi ne rien dire parce que l’inspecteur avait évoqué Frédéric et qu’elle avait peur pour Claire. Ce fut peut-être la colère qui la décida à répondre ainsi :



Furieux, l’homme se tourna vers Pauvert et le fixa méchamment :



Mais Edmond Fabre ne l’entendait pas de cette oreille. Furieux, il frappa du poing sur la longue table de chêne, faisant tressaillir tout le monde :



L’inquiétude qui perçait dans la voix de Pauvert bouleversa madame Fabre :



La jeune fille rougit puis pâlit, manifestement mal à l’aise, soupira, avala sa salive plusieurs fois avant de fixer Marius avec gravité :



L’étonnement et la stupeur s’emparèrent de Pauvert. Et c’est presque avec la voix chevrotante qu’il pria Anita de continuer :



L’inspecteur sourit. Les petites précisions d’Anita lui confirmaient que la deuxième voiture dont les traces étaient visibles près de la Delage carbonisée du comte était celle de Marc Audebert. Les deux hommes s’étaient donc probablement rencontrés puis affrontés près du rocher de la Vierge au Monestier.



Marius Pauvert hocha la tête. Ce néant, il l’avait lui aussi ressenti chez Desgrange. Et il se demandait comment cela était possible alors que le jeune homme était sans doute matériellement, culturellement et moralement parlant, le plus chanceux des Savinois. Était-il, derrière des apparences de richesse matérielle et de plénitude affective, plus démuni que le plus indigent des citoyens du Livradois ? « La profusion d’argent et de biens ne remplit jamais le fond de l’âme. C’est ce que tu ne dois jamais oublier, Marius, si tu penses à faire fortune. » Cette phrase de son père revenait avec force à la mémoire de Pauvert, avec tout le poids que peut prendre une telle sentence dans un contexte criminel. L’inspecteur se souvint de sa visite au château du sorcier, de cette espèce de luxe froid, sans âme, de cette solitude âpre qu’il avait ressentie entre ces murs. Était-ce le deuil sans fin de la comtesse qui avait donné cette coloration au lieu ou bien l’inspecteur était-il déjà mal disposé vis-à-vis du château, de par les agissements criminels constatés de Desgrange ? Troublé par ses propres ressentis, Pauvert passa la main sur son front comme pour chasser de funestes pensées et, reportant ses regards et son attention sur Anita, il demanda :



À cette description, Anita se leva toute pâle et très agitée, porta les mains à son cœur puis frotta son visage avant de s’écrier :



Pauvert, voyant la jeune fille aussi bouleversée, se leva, lui prit les mains pour la forcer à se rasseoir et lui parlant très doucement il questionna :



La jeune fille prit sa tête entre ses mains et se mit à trembler. Pauvert, ému, se pencha vers elle et posant ses deux mains sur ses épaules, il proposa :



Et bouleversée, ne pouvant retenir ses larmes, Anita se dégagea et sortit précipitamment de la maison. Avant que Pauvert ait pu la suivre, Edmond Fabre l’arrêta et lui intima l’ordre de l’écouter.



Pauvert, gêné par l’aveu de monsieur Fabre, détourna les yeux. Lui qui était aussi revenu de la Grande Guerre en ayant perdu la plupart de ses camarades se sentait soudainement privilégié et presque honteux de n’avoir pas plus souffert. Et avec un profond soupir, il conclut :



Edmond Fabre posa sa main sur le bras de Pauvert et protesta :



Edmond Fabre soupira, hocha la tête puis raccompagna Pauvert sur le seuil de la ferme. L’inspecteur démarra en trombe et fut bientôt hors de vue du chemin. Assise sous un frêne près du belvédère qui offrait une belle vue sur le Livradois, montrant Saint-Amant et son église perchés sur la montagne, Anita semblait prostrée et lorsqu’Edmond s’approcha, la jeune fille tressaillit :



Mais la jeune fille ne répondit pas. Elle continuait à voir défiler devant ses yeux le moment passé avec Marc Audebert et se remémorait si exactement son visage, son allure qu’elle s’écria :



Mais à nouveau, Edmond Fabre n’eut pas de réponse de sa fille, qui se leva précipitamment et courut à perdre haleine vers la maison.



(à suivre)