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Temps de lecture estimé : 30 mn
15/10/17
corrigé 06/06/21
Résumé:  Maxime et Chloé vivent un bonheur presque parfait. Ce « presque » pourrait être lourd de conséquences...
Critères:  fh fhh fhhh fbi extracon cocus handicap boitenuit amour cérébral voir fellation cunnilingu 69 sandwich jouet partouze gangbang mélo -amourdura -amourpass -amourdram -regrets
Auteur : Saturne  (Sexagénaire qui exagère, transgressif au clair de lune)      Envoi mini-message

Série : L'émancipation de Chloé

Chapitre 04 / 04
Un bonheur presque parfait

Résumé des épisodes précédents :


« Le prix de la liberté »

« La fête, et… »

« Maxime chéri… »


Pour suivre ses études, Chloé, 18 ans, vient habiter chez son oncle, loin de ses parents. Elle découvre la liberté, avec son lot de bonnes et de mauvaises surprises. Sa première année à l’université touche à sa fin, c’est le joli mois de mai… elle est toujours à la recherche du grand amour ; après quelques tribulations, elle le découvre en la personne de Maxime.



__________________________




Depuis maintenant dix-huit mois, Chloé et moi vivons le parfait amour. Dès le début de notre idylle, j’ai rencontré ses parents qui m’ont vite adopté. Quand notre deuxième année de fac a débuté, ils ont accepté que Chloé vienne vivre dans ma colocation ; l’espace y est réduit, mais nous sommes heureux dans notre petit nid d’amour. Je n’ai jamais connu pareil bonheur, et je la considère comme la femme de ma vie.


Pendant cette troisième année à l’université, je fais régulièrement des stages dans des centres de rééducation fonctionnelle. Ces stages m’amènent parfois à m’absenter plusieurs jours. Nos séparations sont tristes, mais nos retrouvailles enflammées… Notre couple vit de très beaux jours, Chloé sait faire de chaque minute que nous passons ensemble un moment de pur bonheur. Autant le dire : nous frôlons la perfection. Je dis bien « frôlons », car à moi, il me manque quelque chose ; Chloé est parfaite… trop parfaite. Avec elle, les situations sont claires, il n’y a jamais d’ambiguïté. Pourtant, j’aimerais que parfois, par son attitude, elle provoque ma jalousie : je ne l’en aimerais que plus. Mais non, avec elle, jamais de situation scabreuse pour me faire chauffer les neurones.


Par exemple, quand elle va dans la salle de bain commune, je voudrais qu’elle traverse la colocation en sous-vêtements, voire nue, pour connaître les réactions de nos colocataires, qu’ils découvrent cette anatomie qui me fait toujours rêver comme au premier jour. Mais elle ne le fait jamais ; pourtant, ce n’est pas la pudeur qui l’étouffe… j’en veux pour preuve ce qui s’est passé l’autre soir.


Nous étions nus dans notre chambre, moi assis par terre et adossé au grand miroir, Chloé debout face à moi, jambes légèrement écartées, les bras levés en appui contre le miroir. Je lui faisais un cunnilingus tout en la pénétrant avec trois doigts. Elle commençait à geindre doucement quand quelqu’un frappa à la porte. Je commençais à dégager ma tête pour répondre, mais Chloé plaqua son sexe contre ma bouche. Quelqu’un entra ; une voix féminine fit un petit « Oh ! » J’ai continué mes caresses, jusqu’à l’orgasme de Chloé, intense comme toujours. C’est le moment que choisit la fille pour sortir.

De retour sur terre, Chloé m’a dit que c’était une colocataire, Manon, qui était entrée, qu’elle l’avait vue dans le miroir, bouche bée pendant que je la caressais.


Quand Chloé a rencontré Manon le lendemain, celle-ci s’est excusée pour son intrusion. Elle était restée nous regarder, car elle n’avait pas réussi à détacher ses yeux du corps de Chloé magnifié par sa jouissance ; elle a dit à ma chérie qu’elle a un corps de rêve. Chloé a souri, lui a avoué que de se sentir observée avait augmenté son plaisir, et que si Manon n’allait pas raconter que nous sommes des exhibitionnistes nous ne dirions pas non plus qu’elle est une voyeuse. Elles se sont quittées en délirant sur toutes les possibilités grivoises que pouvait offrir notre colocation.


Toute cette parenthèse pour dire que Chloé n’est pas pudique. Alors pourquoi continuait-elle à mettre un peignoir pour aller dans la salle de bain ? Les autres colocataires, filles et garçons, ne se posaient pas autant de questions ; Manon y allait souvent à poil, et personne ne lui faisait de remarques. Enfin, un peu de jalousie dans un couple fait que chacun est plus attentif à l’autre, et cela ne peut que renforcer les liens.

Quand j’ai prononcé cette dernière phrase, elle m’a regardé avec air soupçonneux :



Cette seule phrase sortant de la bouche de Chloé me met en transe ; je l’imagine aussitôt dans les différentes situations et j’ai immédiatement une violente érection.



À ces mots, trop honnête, Chloé rougit violemment. Involontairement, j’avais mis le doigt sur un dossier chaud et je comptais bien en tirer profit immédiatement. Je lui dis que ce qui est amoral, ce n’est pas d’accéder à ses désirs, c’est de dissimuler, voire même de mentir à celui ou à celle qu’on aime, puis j’ai ajouté que si vraiment elle avait fauté, elle devait tout me raconter.


Lors de cette discussion, nous étions au lit ; elle m’a raconté l’initiation de Théo (« Maxime chéri… »), en précisant que c’était pour l’aider, à sa demande, et qu’il n’y avait pas eu de récidive. Elle me parla également du rendez-vous avec la maman de Théo, où elle s’était sentie piégée, et où elle n’avait pas su dire non, car elle en avait vraiment envie.

Tout en l’écoutant, je me suis introduit en elle et suis resté ainsi sans bouger. Elle m’a emprisonné avec ses jambes, comme elle aime souvent le faire. La narration détaillée de cette histoire a généré chez moi une solide érection. Chloé m’a semblé prendre plaisir à détailler les passages les plus chauds dans mon oreille, me confiant son ressenti avec beaucoup de précision. Alors je contractais mon pénis, et elle me répondait en contractant les muscles de son vagin. Deux orgasmes violents et simultanés vinrent clôturer le récit.


Elle m’a tout avoué : qu’elle avait pensé à moi avant de passer à l’acte, qu’elle avait failli renoncer, mais qu’elle en avait eu terriblement envie, que cela avait été plus fort qu’elle. Qu’elle avait honte, qu’il fallait que je lui pardonne sinon elle serait très malheureuse. Je trouvai dans cet exemple concret l’occasion de démontrer le bien-fondé de ma théorie : tromper, c’est cacher ; qu’en me révélant ses dérapages, elle ne me trompait pas : elle faisait de moi son complice, alors je pouvais lui pardonner, ce qui soulageait sa conscience.



Justement, il était là le problème : je n’avais vraiment pas l’intention de me résigner, d’autant plus que ce premier récit m’avait vraiment excité et que j’attendais une suite avec beaucoup d’impatience. Je me doutais qu’elle serait très difficile à convaincre, aussi j’avais échafaudé un plan B : titiller son altruisme… J’y réfléchissais depuis une bonne partie de la nuit quand soudain une idée brillante illumina mon cerveau.



* * *



Dans le cadre de mes stages en centre de rééducation fonctionnelle, j’ai sympathisé avec Quentin, un des garçons dont je m’occupe régulièrement. Il est en fauteuil roulant et je le coache pour faire des exercices qui lui permettent de gagner en mobilité. Il est pleinement conscient qu’il ne retrouvera jamais l’usage de ses jambes. C’est un très beau mec, intelligent et cultivé. Après nos séances de travail, je reste parfois discuter avec lui au foyer du centre ; nous buvons un verre et discutons de tout et de rien. J’apprécie beaucoup sa compagnie ; il n’est pas beaucoup plus vieux que moi, a terminé ses études et travaille à distance, ce qui lui laisse du temps pour sa rééducation. Parfois, je vais dans son appartement en rez-de-jardin ; une pièce est consacrée à sa rééducation. Il suit mes conseils qui lui permettent de développer harmonieusement ses muscles.


D’une manière générale, il vit bien son handicap ; son torse puissant et sa musculature de félin arrivent à compenser la déficience de ses membres inférieurs. Sexuellement, sa libido est normale et déclenche de solides érections, mais il ne peut avoir ni orgasme ni éjaculation, c’est lui qui me l’a dit… Avant son accident, il a connu de très belles filles, mais depuis tout a changé ; il peut sans difficulté avoir des relations, mais rien à voir avec les filles qu’il a connues auparavant. Bien sûr, il pourrait faire appel à des call-girls – il en a les moyens –, mais l’amour tarifé, ce n’est pas son truc…


C’est de cette banale discussion que l’idée m’est venue… en pensant à ma chance de vivre avec Chloé, d’être un homme heureux. Mon amitié avec Quentin m’incitait à partager avec lui ce que j’ai de plus cher et de plus beau : l’amour de ma vie. En contrepartie, je pourrai alors ressentir les tourments de la jalousie, car nul doute que Quentin, malgré son handicap, devait être un amant de choix.

Je décidai d’en parler le soir même à Chloé…



* * *



Nous sommes couchés ; nous nous racontons les anecdotes saillantes de la journée. Je lui raconte mon amitié avec Quentin, en fais une description aussi juste que possible, puis lui parle de l’impossibilité qu’il a de séduire des filles comme il en a connues avant son accident, que c’est devenu le cauchemar de sa vie. Je lui parle également de sa sexualité, tout en soulignant l’injustice de cette situation.

Chloé est allongée contre moi, sa tête posée sur ma poitrine, elle m’écoute attentivement. Elle a certainement deviné mes intentions, mais cette fois elle ne botte pas en touche ; elle m’interroge sur Quentin, sur sa personnalité. Ensuite elle se tait, semble réfléchir, caresse et embrasse ma poitrine, puis demande :



Elle continue longtemps sa réflexion que je n’ose interrompre, puis m’adresse une batterie de questions :


« Admettons que je sois d’accord… As-tu bien pensé à toutes les conséquences pour notre couple ? Es-tu certain qu’après tu m’aimeras autant qu’aujourd’hui ? »


« Tu sais comme moi que les fantasmes stimulent la libido, mais souvent ne se concrétisent pas, que c’est souvent bien mieux ainsi. Es-tu sûr de ne pas avoir à regretter un jour la réalisation de ton fantasme ? »


« Si je vais voir Quentin, ce sera avec toi, et si je couche avec lui, ce sera devant toi. Je veux que tu puisses dire « stop » si après quelques caresses tu ne supportes pas de me voir dans les bras d’un autre. D’autant plus que si je le fais, j’ai bien l’intention de m’éclater, faire tout ce qu’il me propose, voire plus. Je n’ai pas l’intention de jouer les pucelles effarouchées, même lors d’une première fois… Et après avoir tout vu et tout entendu, es-tu sûr de ne jamais me reprocher un geste, une caresse, une parole, un regard, un gémissement, un cri ou un orgasme que j’aurais eu avec lui ? »


« S’il s’avère qu’il est meilleur amant que toi ou si tu constates que ma jouissance est plus forte avec lui qu’avec toi, comment réagiras-tu ? »



J’ai dû être très fin psychologue pour lever tous les obstacles que Chloé élevait devant moi et la rassurer pleinement sur la solidité de mon amour. Je lui ai rappelé qu’elle avait fauté et que je lui avais déjà pardonné ; j’ai même ajouté que c’était une expérience dont notre couple sortirait grandi. Ce qui a finalement été décidé, c’est que je préviendrai Quentin de notre visite, que je lui présenterai Chloé, qu’elle ne s’engage à rien, qu’elle avisera sur place, au feeling…



* * *



Le surlendemain, après notre séance de rééducation, je discute avec Quentin. Je lui dis ce que nous avons convenu avec Chloé : que c’est une amie, qu’elle a manifesté le désir de le rencontrer avec moi, que si le courant passe bien ce pourrait être pour eux un moment très agréable, qu’elle est très libérée et que ma présence passive ne la dérange pas. Quentin est aussi d’accord pour que je sois présent, que ce n’est pas un obstacle pour lui. Il veut savoir si Chloé est jolie ; je lui réponds qu’il risque d’avoir une bonne surprise.



* * *



Le samedi suivant, nous arrivons chez Quentin. Chloé est habillée simplement : chemisier blanc et jean, pas de maquillage. Quand il voit Chloé, le visage de Quentin s’illumine : la surprise semble largement dépasser ce qu’il avait imaginé.

Nous nous asseyons dans le salon pour boire un verre. Entre eux, le courant passe bien ; Quentin est spirituel, prévenant, attachant. Il fait preuve de beaucoup d’aisance avec Chloé et d’autodérision vis-à-vis de son infirmité.


Après avoir fait amplement connaissance, un silence s’installe. Chloé me fixe, semble me poser une question du regard. Ses yeux me disent « Maxime, si tu dois dire non, c’est maintenant ; après, ce sera trop tard… » À cet instant, j’ai envie de tout arrêter, mais je serais ridicule après avoir tant insisté. Je sens mon ventre se nouer, car je sais qu’une fois lancée, rien n’arrêtera plus Chloé. Je réponds par un timide sourire.

Chloé se tourne vers Quentin et lui demande :



Elle vient de lancer un signal sans équivoque. La pomme d’Adam de Quentin fait un difficile aller-retour ; il pose ses avant-bras sur les accoudoirs de son fauteuil comme si celui-ci allait décoller. Son sexe tend son pantalon, le mien l’imite ; cela peut s’appeler du réflexe conditionné… Chloé se met face à lui, le regarde dans les yeux, se dénude lentement. Quentin est médusé. Ce qu’il voit, il n’osait l’imaginer. Pourtant, Chloé n’en rajoute pas : elle doit vouloir se ménager une porte de sortie au cas où elle ne se sentirait pas capable d’aller jusqu’au bout de mon délire.


Quand elle est nue, Quentin est toujours dans son rêve, sans voix. C’est Chloé qui lui demande timidement :



Son regard émerveillé le dispense de répondre à la question. Alors Chloé me regarde brièvement puis vient s’asseoir à califourchon sur les jambes de Quentin et l’embrasse longuement sur la bouche. Il pose ses mains sur les hanches de Chloé, puis les mains descendent sur ses fesses et les épousent. Chloé le déshabille et reprend sa position sur les genoux de Quentin. Il caresse doucement les seins de Chloé ; assez rapidement elle émet de petits soupirs qui se transforment vite en gémissements.


Les mains, la bouche et la langue de Quentin visitent le corps de Chloé et le font vibrer. Il la complimente pour sa beauté, pour sa sensualité, pour le goût de sa chair, de sa cyprine. Elle me regarde souvent, épie mes réactions à chaque nouveau geste, chaque nouveau baiser. Ils semblent tous les deux très à l’aise ; ma présence ne doit absolument pas les gêner, peut-être même ressentent-ils le plaisir de s’exhiber. Mon érection est douloureuse, j’ai envie de me soulager, mais je n’ose… Soudain, Chloé perd le contrôle de son corps et crie sa jouissance en me regardant, puis s’avachit sur Quentin, semblable à un pantin désarticulé.


Quand elle a repris ses esprits, ils vont dans la chambre. Je les regarde du salon sans entrer dans la pièce, honteux de mon voyeurisme. Quentin est allongé sur le dos, Chloé me tourne le dos ; le sexe tendu planté dans son vagin, elle remue ses fesses avec beaucoup de sensualité. C’est très beau et très érotique, mais j’ai mal. Elle tourne la tête, m’aperçoit, fait demi-tour pour pouvoir m’observer ; elle caresse son clitoris tout en s’empalant. Lui caresse les seins de sa maîtresse avec beaucoup de dextérité. Le regard de Chloé me parle ; je n’arrive pas à tout décoder. Elle doit me dire qu’elle m’aime, qu’elle aime aussi se faire prendre par un autre devant moi, qu’elle aime voir mes yeux hallucinés et sentir la jalousie qui me taraude, qu’elle ira jusqu’au bout de son plaisir…


Qu’elle est belle… et dire qu’elle est à moi ! Je n’oserai raconter à personne ce que je demande à Chloé : on me prendrait pour un imbécile, un fou ou un pervers. Pourtant j’ai osé, et je ne sais pas encore si je vais le regretter, car leur étreinte est de plus en plus sauvage, et de voir le corps de Chloé subir le joug de Quentin me fait très mal.

Chloé me regarde après chaque orgasme, cherchant dans mes yeux le signe de mon renoncement. Elle semble me dire « C’est bien ce que tu voulais ? Es-tu rassasié ? Moi, j’ai de plus en plus faim ! »


Comme j’essaie de me montrer indifférent à sa provocation, je la vois humecter ses doigts dans sa bouche en me regardant fixement, puis pénétrer son anus pour le préparer à la prochaine saillie. Alors mon cœur s’arrête de battre, ma gorge est sèche, j’ai envie de pleurer… Seule ma bite imbécile se réjouit par avance du spectacle auquel je vais assister.


Je n’en peux plus de les regarder ; je me tourne, m’éloigne, mais je les entends, trop bien… Ils continuent leur corps-à-corps, longtemps, très longtemps, trop longtemps, indéfiniment… Je voudrais maintenant qu’ils s’arrêtent, pouvoir rentrer, embrasser Chloé, lui dire que je l’aime, que je regrette, mais ils n’en ont jamais assez. Les cris de Chloé me vrillent les tympans, ses abandons me coupent la respiration… Je voudrais fermer la porte pour ne plus entendre ses cris, mais ce serait reconnaître mon erreur. Alors je me résigne…


La nuit arrive ; Chloé est assoupie sur le lit de Quentin, épuisée, rassasiée. Quand j’entre dans la chambre, l’odeur de sueur et de mouille inonde mes narines. J’aperçois d’abord le visage d’ange doucement éclairé par la lumière orangée du soir qui contraste avec son corps pantelant, rompu par son libertinage. Elle est parcourue à intervalles réguliers par de petits spasmes, résurgences de ses multiples orgasmes ou rêves érotiques. L’acte est consommé. Je crève de jalousie et ne ressens plus l’excitation de tout à l’heure. Inconsciemment, j’aurais souhaité qu’elle prenne moins de plaisir dans ces attouchements, mais elle ne peut contrôler ses orgasmes : je le savais depuis ma première nuit avec elle.



* * *



Quand Chloé se réveille, ils vont dans la salle d’eau en laissant la porte grande ouverte. J’entends des rires, des gloussements, des gémissements, des cris, puis le silence. Je jette un œil dans la pièce : ils se massent mutuellement pour se défatiguer. Quand ils ont terminé, ils discutent joyeusement ; leur complicité me fait autant souffrir que leurs étreintes, j’ai l’impression d’être exclu de leur monde. Mais heureusement, ils ont fini, ils sont épuisés…


Chloé et moi allons quitter Quentin. Je suis derrière son fauteuil roulant, Quentin regarde s’éloigner son rêve d’un jour. Dans le miroir de l’entrée, je le vois qui regarde intensément Chloé pour s’imprégner de son image. Après les heures de volupté qu’il vient de vivre, ses yeux brillent, mais on peut y déceler l’angoisse du mot « fin ». Chloé se retourne ; elle aussi a lu dans les yeux de Quentin son anxiété. Elle s’approche de lui :



Le visage de Quentin se décompose ; il croit que ce bonheur n’aura pas de suite. De mon côté, je ressens aussi une déception, car j’ai vécu ces heures intensément et le retour à la routine risque d’être plus ennuyeux. Chloé a perçu les changements de son visage ; elle s’empresse de continuer sa phrase avant qu’il ne soit triste :



Chloé a bien souligné les « chaque fois » pour qu’ils retentissent dans mes oreilles comme autant d’avertissements… Un beau sourire envahit le visage de Quentin ; en quelques secondes, il vient de passer de l’enfer au paradis.



Puis Chloé me regarde furtivement pour me faire comprendre qu’elle s’adresse également à moi quand elle lui demande :



J’acquiesce d’un clignement des yeux pendant que Quentin répond :



Chloé vient s’asseoir à califourchon sur ses jambes, attrape sa nuque à deux mains et l’embrasse fiévreusement sur la bouche. Elle frotte ses seins sur sa poitrine et fait rouler son cul sur le sexe de Quentin. Ils restent très longtemps à s’embrasser avec passion. Mon ventre est noué par la jalousie ; je ressens un grand vide comme si je venais de perdre bêtement Chloé, par ma faute, pour assouvir un fantasme que je juge à cet instant ridicule.



* * *



Trois jours passent. Je vois Chloé aller prendre une douche. D’habitude, ses ablutions du soir précèdent nos ébats amoureux, aussi je me prépare mentalement à un moment intense, car j’ai souvent été négligé ces derniers jours.

Quand elle revient dans la chambre, elle est accompagnée de Manon qu’elle tient par la main. Devant mon air interrogateur, elle me dit :



Commence alors sur notre lit un intense duo saphique qui me fait bouillir le sang. Les baisers, les caresses, les langues fureteuses, les pénétrations digitales, les orgasmes et les cris se succèdent sans discontinuer à quelques centimètres de mes yeux, de mon nez et de mes oreilles. Mon sexe est douloureux à force d’excitation. J’ai une envie folle de participer, mais je respecte l’interdit, me contente de me rincer l’œil. Dans les moments les plus torrides, lorsqu’elle est encore consciente, Chloé me regarde avec des yeux brillants, essayant peut-être de découvrir des traces de remords sur mon visage.

Quand, épuisées, toutes deux se reposent langoureusement, Chloé me demande :



J’acquiesce et m’apprête à profiter de son corps. Elle me dit qu’elle est exténuée, qu’elle veut maintenant dormir. Cette nuit encore, ce sera frustration et nuit blanche.



* * *



Le samedi suivant, elle me dit qu’elle va voir son amant. Elle passe beaucoup de temps dans la salle de bain à se préparer, puis vient s’habiller devant moi. Je la vois mettre cette magnifique guêpière qui me rend fou de désir, puis ses bas ; enfin, sans mettre ni culotte ni robe, elle enfile directement son imperméable. Pendant qu’elle se regarde dans la glace, ouvrant et refermant l’imper pour apprécier l’effet produit, je glisse mes mains sous le vêtement et entreprends de caresser ses fesses. Elle attrape mes mains et me dit :



Et je la vois partir avec un sourire très coquin qui me noue l’estomac.



Elle rentre tard dans la nuit, me fait comprendre qu’elle en a vraiment bien profité, que c’était merveilleux, que Quentin est un amant expérimenté et plein d’imagination, que je l’ai bien choisi, mais que malheureusement elle n’est plus du tout en état de me satisfaire, ni même de me raconter sa nuit d’extase. Elle s’endort sur mon épaule après m’avoir embrassé sur la joue et m’avoir dit qu’elle me remerciait d’accepter qu’elle passe de si bons moments, que finalement c’était une très bonne idée et qu’elle ne m’en aimait que plus d’accepter de la partager avec d’autres.

Cette nuit-là encore, je l’ai passée sans fermer l’œil.



* * *



Une autre fois, en rentrant, quand elle s’est allongée nue sur le lit à plat ventre, je découvre des traces de lanières sur ses fesses et sur son dos. Je vais me mettre en colère après Quentin, mais Chloé me dit que c’est elle qui lui a demandé de la frapper, qu’il avait voulu refuser, mais qu’elle l’avait menacé de le quitter s’il ne s’exécutait pas.

Il s’agissait d’un jeu dans lequel elle était punie pour sa lubricité : ce châtiment lui donnait bonne conscience, elle comptait lui redemander souvent. Elle me dit aussi qu’ils avaient acheté sur catalogue toute une collection de sextoys, dont le martinet faisait partie.



* * *



Un matin, elle me raconta la nuit qu’elle venait de passer avec Quentin et Manon. Que ses deux amants d’un soir lui avaient fait découvrir la double pénétration, Manon avec un énorme gode-ceinture, et Quentin sur lequel elle était venue se sodomiser. Manon avait eu beaucoup de mal à la pénétrer avec le gode-ceinture dont le diamètre était impressionnant ; Chloé avait cru qu’ils allaient la déchirer tellement ses chairs étaient distendues. La pénétration avait duré très longtemps et elle avait connu l’orgasme le plus intense de sa vie. Elle avait tellement manifesté son plaisir que les voisins de Quentin étaient venus toquer à la porte pour faire cesser le vacarme.


Comme à chaque fois, elle était exténuée à son retour, mais accepta que je la pénètre pour ne pas trop me frustrer. Comme elle n’avait aucune réaction pendant notre accouplement, je compris qu’elle dormait profondément malgré mes coups de reins.



* * *



Cette période un peu folle où je n’arrivais plus à savoir si j’avais atteint le paradis ou l’enfer a continué jusqu’à la fin de l’année universitaire. C’est là que Chloé m’a annoncé qu’elle allait partir à l’étranger pendant deux ans pour continuer ses études, que cela nous donnerait un peu de temps et d’espace pour réfléchir à notre couple. La nouvelle tomba sur moi comme un couperet. Bien sûr, j’avais remarqué que nos rapports avaient évolué, que nous n’avions plus la même complicité, que notre sexualité avait souffert de la réalisation de mes fantasmes, mais je m’étais persuadé que les sentiments de Chloé à mon égard n’avaient pas changés, ce dont je n’étais maintenant plus si certain. Quant à moi, je l’aimais toujours autant, et c’est avec désespoir que j’appris sa décision.


Les mois ont passé, nos contacts se sont espacés. Je m’habituais peu à peu à son absence, et un jour nous n’avons plus pris de nouvelles l’un de l’autre. Le feu s’était éteint.



* * *



Après l’obtention de mon diplôme, je me suis installé en région parisienne où j’ai trouvé facilement un emploi dans un centre de rééducation. En complément, je travaille dans un cabinet médical pluridisciplinaire, spécialisé dans la rééducation fonctionnelle.

J’ai rencontré plusieurs filles avec lesquelles j’ai vécu de quelques semaines à plusieurs mois, mais jamais rien de sérieux. Néanmoins, je ne désespère pas de remplacer un jour Chloé… J’allais en avoir l’occasion un soir où un copain avait organisé une sortie en boîte à Paris avec une de ses amies. Je me réjouissais par avance, car cette fille me plaisait beaucoup, et lors de notre dernière rencontre elle avait semblé s’intéresser à moi, aussi j’étais pressé de la retrouver pour tenter de la séduire.


Nous nous étions donné rendez-vous devant la boîte à une heure du matin. Ce soir-là, j’étais très motivé, et par peur d’être en retard je suis arrivé avec une bonne demi-heure d’avance ; j’en ai profité pour visiter le quartier. À peine sur les lieux, je vois passer une fille magnifique, à l’allure de mannequin. Elle me fait beaucoup d’effet, me frôle sans me voir ; je dois m’effacer pour lui laisser le passage. Son parfum m’enrobe, elle éveille mon intérêt, je la suis des yeux…

Elle s’arrête quelques mètres plus loin devant un club, mais pas celui où nous avons rendez-vous. Une autre fille l’y attend et l’embrasse sur la bouche. Mon regard se concentre sur l’autre fille, mais je ne la vois pas très bien. Ma curiosité me pousse à m’approcher, et là, je crois défaillir : c’est Chloé ! Est-elle devenue lesbienne ? Que fait-elle à Paris ? C’est vrai que ses études doivent maintenant être terminées…


À l’instant où je l’aperçois, le chagrin que m’a causé son départ refait surface. Une voix en moi m’interroge : « Que fait-elle maintenant ? Où habite-t-elle ? M’a-t-elle remplacé ? Est-elle heureuse ? A-t-elle revu Quentin et Manon ? Pense-t-elle encore à moi ? » Une autre voix, plus raisonnable, me dit : « Mon cœur, mon cœur, ne t’emballe pas ! Tu as déjà trop souffert ; oublie-la définitivement sinon tu ne t’en remettras jamais ! » C’est la curiosité qui l’emporte. Le temps que je délibère avec moi-même, elles sont entrées dans la boîte ; je les suis. Quand je sonne, une lucarne s’ouvre, une femme me détaille de la tête aux pieds, demande si je suis accompagné ; je lui réponds que non. Elle me demande de patienter quelques instants et m’ouvre la porte.


L’hôtesse qui vient de m’ouvrir me demande si je suis déjà venu ; je lui dis que non. Elle m’explique les règles du lieu ; je comprends très vite que je suis tombé dans un club libertin, genre d’endroit que je n’ai jamais fréquenté. Je laisse ma veste au vestiaire et m’aventure dans la boîte. Les explications de l’hôtesse sont suffisamment précises pour que je puisse m’orienter seul. Je commence par le bar, pensant y retrouver Chloé et sa copine. Comme il y a beaucoup de recoins, je mets un certain temps pour en faire le tour. De nombreux couples sont assis au bar et discutent, se font de discrètes caresses sans se dénuder. Plusieurs couples dansent des slows à deux, à trois ou à quatre en se pelotant ouvertement. Les filles sont généralement habillées très sexy, avec des robes qui laissent transparaître leurs sous-vêtements, quand elles en portent…


Pour me donner une contenance, je prends une consommation au bar, fais un rapide tour d’horizon comme si je cherchais quelqu’un. Des yeux de femmes croisent parfois mon regard, me sourient sans vulgarité ; j’ai même droit à un joli clin d’œil complice. Je m’attendais à quelque chose de plus glauque… Je jette un œil dans les recoins du bar ; c’est déjà plus chaud : des mains s’aventurent sous les robes et dans les pantalons, je perçois même de petits gémissements.


Je continue mon exploration par un couloir qui donne accès à de petites pièces faiblement éclairées. Certaines portes sont fermées, d’autres restent ouvertes. Elles sont toutes occupées. J’entre dans chacune des pièces, espérant retrouver Chloé et sa copine…


Dans la première pièce, deux couples se caressent réciproquement le sexe. Ils sont restés habillés : cela ne doit pas être très pratique… Dans la seconde pièce dont la porte est verrouillée, je peux voir par la vitre deux filles qui font un 69 ; deux hommes les regardent en se branlant distraitement. Elles sont nues, les gars sont habillés, ils ont juste ouvert leur braguette. Dans la troisième, deux couples sont accouplés en levrette, côte à côte ; tous sont habillés. Je commence à penser que les échangistes sont pudibonds ou très pressés. Leur porte est ouverte, et plusieurs hommes les regardent avec une main qui s’agite dans le pantalon. D’où je suis, j’entends les gémissements et le choc des peaux qui se percutent. Le spectacle est intéressant, mais mon esprit est ailleurs.


Je quitte la pièce d’autant plus vite qu’une femme qui vient d’arriver me caresse distraitement les fesses et frotte sa poitrine dans mon dos, je sens son parfum et son haleine chaude dans mon cou. Je préfère ne pas me retourner et pars visiter les autres pièces. Malheureusement, une est fermée à clef et n’a pas de fenêtre : mes deux friponnes sont peut-être dedans…


Il me reste deux pièces à visiter. La première avec une lumière pâle, envahie par un nuage blanc transparent qui crée une atmosphère onirique. Les gémissements y sont nombreux et sonores : l’acoustique de la pièce permet une diffusion parfaite de chaque son ; c’est terriblement excitant. Quand je m’approche, assez difficilement vu l’affluence des curieux, je vois plusieurs femmes allongées sur le dos, les unes à côté des autres, les fesses à la limite d’un lit très large, les jambes relevées, qui se font pénétrer par des types qui sont debout et habillés, entourés d’hommes qui matent ou attendent pour prendre leur tour. Mais celle que je cherche n’est toujours pas là.


A ce stade de ma visite, il me reste deux pièces à visiter : la chambre dans laquelle je n’ai pu pénétrer, et le salon dans lequel je me rends. Contrairement aux autres pièces, celle-ci est assez bien éclairée. J’hésite à entrer, car d’où je suis, je ne vois que des hommes. Je me dis qu’il s’agit peut-être d’une pièce réservée aux gays, mais je veux avoir une certitude. Je m’approche du groupe qui semble hypnotisé par ce qu’il voit, et là, c’est le choc ; je n’en crois pas mes yeux !



Chloé est en position de levrette, les reins cambrés, au milieu d’un immense lit, vêtue d’escarpins, de bas et d’une guêpière qui dénude ses seins. Elle se fait besogner par un gaillard bodybuildé dont le corps est en grande partie recouvert de tatouages. Il la pénètre brutalement, mais elle ne semble pas s’en plaindre. Le tableau est excitant : la belle et la bête… Son regard est absent, elle est concentrée sur son plaisir. Mon émotion est très forte ; je ressens à nouveau la morsure de la jalousie, aussi vive que la première fois où je l’ai vue avec Quentin, et je sens aussi cette magnifique érection qui va de pair…


Sa copine est à côté d’elle, à genoux, suçant deux belles queues. À peine suis-je arrivé que Monsieur Muscle pousse un long râle. Quand le sexe du gars quitte le ventre de Chloé, je suis très impressionné par ses dimensions : il est long et épais, recouvert d’un préservatif. À priori, ce n’est pas son mec, car il quitte la pièce en se rebraguettant comme s’il sortait des toilettes.

La copine arrête de sucer les deux gars et fait s’allonger le premier. Je me déplace pour mieux voir Chloé. Elle vient s’asseoir à califourchon sur le bassin du type qui est allongé ; une fois en place, elle pose sa poitrine sur son ventre. À peine est-elle installée que le deuxième gars vient la sodomiser sans ménagement.


Devant moi, certains types du premier rang ont leur main sur ou dans leur pantalon ; ils attendent leur tour ou regardent le spectacle, ou les deux. Chloé est toujours aussi concentrée, elle gémit doucement sous la violence des chocs. La copine suce deux nouveaux gars tout en suivant le spectacle du coin de l’œil. L’atmosphère du lieu est lourde, les yeux des spectateurs sont pleins de convoitise. Dans ce genre de club, les femmes sont reines : ce sont elles qui décident ce qu’elles font et avec qui elles le font, et beaucoup d’hommes doivent être frustrés ; c’est tout à fait mon cas.


En fond d’écran, je vois défiler mes nuits d’amour avec Chloé, ce bonheur simple dont j’avais su longtemps me contenter, et j’ai mal, très mal. Je savais après être entré ici que j’allais souffrir, mais à ce point, je ne pouvais l’imaginer. Partir, regarder, m’enfuir… Malgré moi, je reste… incapable de bouger, résolu à boire le calice jusqu’à la lie.


Sur le lit, l’action s’accélère, Chloé commence à crier. Je reconnais les modulations de son orgasme, il n’a pas beaucoup changé ; il est plus contenu, moins spontané. Une fille, derrière moi, s’appuie sur mes épaules pour regarder, frotte sa poitrine contre moi. Je suis légèrement déséquilibré et bouscule le type qui est devant moi. Je lui présente mes excuses. Il se retourne : il a à peu près mon âge, il a l’air sympa. Il me demande si c’est la première fois que je viens ici. Je réponds affirmativement, et il me dit :



La fille derrière moi continue de m’entreprendre malgré mon absence de réaction. Comme je n’ose la repousser, elle fait le tour de ma taille avec son bras et viens caresser mon sexe par-dessus mon pantalon ; elle m’embrasse dans le cou par la même occasion. Elle me susurre à l’oreille :



C’est vrai que la fille qui me pelote est bien foutue et fort déshabillée, mais ce n’est pas elle qui me fait bander, et je ne vais pas le lui dire. Je lui réponds :



C’est à cet instant qu’un type arrive et demande à la fille ce qu’elle fiche. Elle répond :



Elle s’en va, accompagnée du type, avec un petit air dédaigneux.

Pendant ma conversation, la double pénétration s’est terminée ; Chloé a crié sa félicité. Puis les deux types se sont rhabillés, l’ont remerciée très gentiment, lui ont fait la bise et ont quitté la pièce.

Pendant quelques minutes Chloé récupère de son orgasme, semblant chercher autour d’elle celui qui va la contenter de nouveau. Le type devant moi se retourne encore et commente :



Comme elle n’a pas trouvé au premier rang ce qu’elle cherchait, Chloé se met sur la pointe des pieds pour regarder le deuxième rang des prétendants. Je me baisse discrètement pour ne pas me faire repérer, mais elle a entrevu mon mouvement. Curieuse, elle s’avance pour savoir qui se cache, me reconnaît… Son visage se fige, elle ne dit rien, se retourne, ramasse sa robe, fait comprendre que la séance est terminée. Des soupirs de déception se font entendre, mais aucun propos incorrect : nous sommes entre gens bien élevés…


Je profite de l’incident pour m’éclipser et vais aller retrouver mes amis avec un bon retard, me libérer enfin de la douleur qui m’étreint. Quand j’arrive vers la sortie pour payer, Chloé est à côté de moi, quasi nue, en larmes. Contrairement à ce que je pensais, je n’ai plus envie de la questionner, de tout savoir. Passée l’excitation de ses étreintes, je ne ressens plus que ma détresse, tout ce que je fuis depuis plus de deux ans.



Je suis dans l’expectative ; je veux fuir toutes les tortures que j’ai endurées, sauf que voilà, la tortionnaire est devant moi, plus belle et plus désirable que jamais, et mes pieds restent cloués au sol. Le temps que je médite, Chloé a enfilé sa robe. Nous nous dirigeons vers la sortie. Je paye ma note, Chloé ne paie rien : une cliente comme elle doit en être dispensée.

Nous allons dans le bar le plus proche, peuplé par des fêtards entre deux bars, entre deux boîtes, entre deux cuites, cherchant l’âme sœur.



Elle n’arrive pas à terminer sa phrase, ses pleurs l’étouffent. Sans que mon cerveau l’ait décidé, ma main est allée caresser sa joue tendrement pour effacer ses larmes. Elle se reprend :



Autour de nous, ce ne sont que plaisanteries grasses de fin de nuit, haleines chargées, propos équivoques et langage fleuri. Dans son coin, le guitariste reprend les paroles du poète :



Mais Chloé et moi sommes sur une autre planète. Je sais que je devrais fuir pour ne plus jamais avoir à souffrir, mais j’ai surtout envie de lui dire que je n’ai jamais cessé de l’aimer, qu’elle peut bien me faire tout ce qu’elle veut, que je l’aimerai toujours et encore. J’ai oublié toutes mes résolutions, je me sens faible et misérable…

Chloé a mis sa main sur la mienne :



M’enfuir ou lui avouer mon amour, je n’arrive pas à choisir, alors je dis la première phrase qui me vient à l’esprit, celle que j’avais prononcée lors de notre premier rendez-vous :



Son visage s’éclaire, elle me sourit tout en pleurant à chaudes larmes et répond :



Le propos est complètement décalé dans ce lieu, mais je vois qu’elle non plus n’a pas oublié sa réplique et nos premiers instants de complicité, ceux sur lesquels nous avons bâti notre bonheur. Elle vient s’asseoir à côté de moi, pose sa tête sur mon épaule, pleure doucement. Je bois ses larmes.



Chloé m’a amené dans son studio, a pris une douche, s’est allongée contre moi. Nous avons parlé doucement jusqu’à ce que le sommeil nous terrasse, au petit matin.

Au réveil, elle me dit qu’elle va passer le dimanche chez ses parents avec le tonton, que je peux rester chez elle, qu’elle serait vraiment très heureuse de me retrouver à son retour. Mon cerveau est calme, serein, détendu, comme il ne l’a pas été depuis très longtemps. Je réfléchis quelques instants, puis lui demande si je peux venir avec elle ; elle me répond qu’elle en avait très envie, mais qu’elle n’aurait jamais osé me le proposer.



* * *



Nous avons passé le week-end chez ses parents. Ils m’ont reçu avec beaucoup de gentillesse, comme si nous n’avions jamais été séparés. Sa maman m’a accroché par le bras, m’a pris en aparté pour me dire qu’elle était très heureuse de me revoir, que depuis notre séparation elle ne reconnaissait plus Chloé, qu’elle était souvent triste et que je devais lui manquer. Elle a ajouté :



Nous avons déjeuné sur la terrasse ; nous étions tous d’excellente humeur. Le repas terminé, Chloé est allée préparer le café. J’ai profité de son absence pour parler à ses parents :



Les parents et l’oncle me regardent avec étonnement, car je ne les ai jamais habitués à de telles saillies.



Tous trois me regardent, émus ; la maman a la larme à l’œil. De ses deux mains elle prend appui sur le bras de son mari.



À ce stade, la maman pleure comme une fontaine. Le papa la prend par les épaules et l’oncle par le bras pour la soutenir.



Maintenant, ils sont trois à avoir la larme à l’œil, avec la maman qui a pris une avance considérable.



L’émotion les empêche de répondre. Après quelques instants, le papa s’éclaircit la gorge pour prendre la parole, juste au moment où Chloé revient avec le café ; elle le pose sur la table basse puis regarde ses parents, soudainement affolée par les visages en pleurs. Elle demande avec appréhension :



La réponse ne venant pas, elle s’inquiète :



Son père balbutie :



Elle me regarde, inondée de bonheur, me saute au cou, me renverse sur la table en cassant moult vaisselles, s’allonge sur moi et m’embrasse avec passion. J’ai l’impression qu’elle va me violer sur la table. Quand elle quitte ma bouche, c’est pour me dire :



Ils sont maintenant quatre à pleurer, et je ne suis pas mieux. Ils m’embrassent tous avec tendresse. Chloé me regarde étreindre ses parents, puis me dit :




* * *



Il nous a fallu un week-end entier pour nettoyer la chemise, mais cela n’a pas suffi, car à notre départ la chemise était toujours aussi tachée. J’ai dit à Chloé que ce n’était pas très important, que nous allions la garder comme elle est, en souvenir.


Ses parents ne nous ont pas revus du week-end. Pour une raison incompréhensible, ils semblaient ravis que nous n’ayons pas réussi à nettoyer la chemise. Allez savoir…



Fin