n° 18435 | Fiche technique | 46845 caractères | 46845 8019 Temps de lecture estimé : 33 mn |
24/06/18 corrigé 06/06/21 |
Résumé: Beisse, député de la Raie Publique, est une saloperie ; il a été assassiné. Le commandant Riquebit et le capitaine Jaude sont chargés de l'enquête. Où l'on a de plus en plus envie de féliciter le tueur. | ||||
Critères: #policier fh | ||||
Auteur : Domi Dupon (une antiquité sur le site) Envoi mini-message |
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Résumé du chat pitre précédent : Un inconnu libère une jeune femme des griffes du député Beisse et laisse ce dernier attaché sur une croix de Saint-André où une patrouille de la BAC le trouvera. Le commandant Riquebit est chargée de l’enquête. On fait connaissance avec la première femme de Beisse et on commence à avoir envie de décorer l’assassin ! Un conseil, si vous voulez y comprendre quelque chose, lisez les parties 1, 2 et 3 :
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Samedi matin : dans Paris
Pour Tom et Éléonore, la nuit avait été courte. Lequel s’était réveillé le premier ? Elle ne s’en souvenait pas. Lequel avait prodigué la première caresse ? Cela n’avait guère d’importance. Ils s’étaient aimés sensuellement, délicatement, tendrement. Oubliée, la fureur amoureuse de la veille ; ils avaient seulement fait l’amour, et quand il s’était répandu en elle, elle avait ressenti un sentiment de plénitude incroyable. Elle repensait à ce moment alors qu’ils revenaient vers la DCPJ.
Lorsqu’ils s’étaient levés, affamés, le soleil de mars pointait juste le bout d’un rayon. L’enquête, après leurs câlins du matin, s’était invitée au petit déjeuner. À huit heures, elle avait appelé Héléna Beisse pour lui annoncer leur visite puis laissé un message à leur patron, l’avertissant qu’ils allaient interroger la veuve avant de passer au 36. À l’aller, ils avaient parlé de l’enquête, de tout, de rien, accompagné de petits gestes tendres dans une complicité totale. Au retour, l’atmosphère était beaucoup plus tendue. Tom, concentré sur sa conduite, ne pipait mot, attendant l’orage.
Après dix minutes de ce silence pesant, elle n’y tint plus et la question claqua tel un coup de tonnerre :
Tom comprit l’inutilité de tergiverser.
Ben oui, elle était jalouse. Le fait de le formuler lui éclaircit les idées. Quand elle collectionnait les aventures d’un soir, elle lui reprochait de ne pas avoir été abstinent alors qu’ils n’avaient même jamais échangé un baiser. Consciente de sa stupidité, elle lui répondit :
Il posa sa main sur son genou.
Tom prit le temps de réfléchir avant de répondre. Un coup de klaxon le rappela à l’ordre car il n’avait pas vu le feu passer au vert.
Elle relativisa la portée de sa flèche en posant à son tour sa main sur la cuisse de son amant.
Elle marqua une hésitation.
Le silence s’installa de nouveau mais sa tonalité n’était plus la même. Éléonore, sa sérénité retrouvée, sentait son désir renaître. Sa main qui n’avait pas quitté la cuisse de Tom se montrait caressante, remontant lentement mais sûrement vers le service trois-pièces qui l’avait tant réjouie cette nuit. Elle effleurait du bout des doigts une bite qui progressivement tendait l’étoffe du jean. Tom affichait un air satisfait.
Joignant le geste à la parole, elle avait dégrafé ceinturon et braguette. Elle glissa sa main dans le boxer qui résistait vaillamment à la pression exercée par un phallus en pleine expansion.
Jaude ne lui répondit pas, trop occupé à rester concentré sur sa conduite alors qu’une main divinement experte manipulait popaul. Éléonore, consciente et jouissant de la situation, se limitait à des effleurements, des glissades du haut de la tige raide aux boules durcies. En milieu ouvert, il aurait supporté ces attouchements ludiques sans dommages collatéraux, mais dans cet espace comprimé il était constamment au bord de l’explosion. Celle-ci faillit avoir lieu à un feu rouge. Sur la file de droite, une charmante jeune femme au volant d’une camionnette de livraison avait une vue plongeante sur l’habitacle. Elle ne perdait pas une miette du spectacle, et quand elle accrocha son regard, elle lui fit un signe bien connu pouce levé, suivi d’un non moins connu va-et-vient, les doigts en anneau. Heureusement, le feu passa au vert. « Sauvé par le gong ! »
Ils arrivèrent au 36 avant que son boxer n’accueille les manifestations de son plaisir.
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Dimanche midi : 36 rue du Bastion
Dès leur entrée dans l’open-space qui leur tenait lieu de bureau, un OPJ les avertit que le divisionnaire les réclamait à cor et à cri et qu’il n’avait pas l’air très content. Cela fit ricaner Éléonore qui souffla à Tom :
Mabel raccompagnait Serge Ampépeur, un jeune brigadier de la PTS (Police Technique et Scientifique) vraiment canon avec qui, quelques semaines plus tôt, elle aurait volontiers échangé quelques fluides. Malheureusement, il avait rougi à sa première œillade et s’était fermé comme une huître à sa première allusion grivoise. Beau, mais pas marrant. Pas un gibier pour elle.
Elle le coupa :
Mabel leur montra les photos des deux jeunes femmes : anthropométrique pour la première et portrait style passeport pour la seconde. Éléonore les observa attentivement avant de demander :
Devant l’air interrogatif de Mabel, elle ajouta avec un sourire mielleux :
Elle les observa attentivement, son regard passant de l’une à l’autre comme si elle espérait qu’elles lui parlent.
Mabel, ménageant ses effets, marqua un silence et sortit une nouvelle photo qu’il retourna lentement.
Ils lui rapportèrent leur rencontre avec Héléna Beisse. Éléonore lui proposa son hypothèse.
Éléonore lui colla un gros baiser sur chaque joue.
Les deux amants se regardèrent en souriant.
Jaude singea un salut militaire :
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Dimanche après-midi : téléconférence avec Maryvonne Sylvestre
Ils contactèrent sans difficulté la première femme de Beisse. Non seulement ils la trouvèrent chez elle, mais elle utilisait Skype et proposa de leur parler immédiatement. Ils arguèrent qu’ils n’avaient pas encore mangé pour repousser la vidéoconférence en début d’après-midi.
Ils prirent un repas rapide dans le même resto que la veille. Ensuite Tom passa à son appartement pour se changer. Après la chaude nuit qu’il avait passée, ce n’était pas un luxe. Il en profita pour faire un peu de rangement.
Dès son départ, Riquebit se replongea dans l’enquête. Elle établit une chronologie des événements probables à partir des éléments qu’elle avait, revit toutes les analyses et les documents en leur possession. Pensive, elle contemplait fixement, la paperasse éparpillée devant elle, les photos des filles. Elle retourna aux comptes rendus des recherches effectuées autour du pavillon : ça n’avait pas donné grand-chose, à part un nombre important de traces de pneus ; mais avec toutes les bagnoles – entre autres celles des journalistes – qui avaient circulé ce soir-là, il ne fallait pas en attendre grand-chose. Elle reprit les photos, compara celles qu’ils avaient des deux filles identifiées à celles récupérées sur l’ordi. On ne les reconnaissait pas.
Quelque chose la tracassait, un truc qu’elle avait vu, lu ou entendu pendant la réunion avec Mabel. Elle eut beau se repasser le film de la réunion, elle n’arriva pas à mettre le doigt dessus. Pourtant, elle était sûre. Son instinct la trompait rarement. Il faudrait qu’elle y réfléchisse à tête reposée.
Au retour de Jaude, elle lui fit part de ses conclusions. Elle avait éliminé la préméditation, et pour l’instant privilégiait le crime d’opportunité commis par une seule personne. Personne qui se trouvait là par hasard (difficile à admettre) ou qui devait retrouver Beisse ce soir-là. Peut-être un complice de débauche qui avait pris peur en le trouvant sur sa croix.
Sans réfuter cette hypothèse, Jaude lui rétorqua qu’on ne pouvait exclure l’intervention d’un séide des Mariani ou autre truand qui avait eu peur d’être impliqué après l’intervention de l’inconnu. Peut-être Beisse avait-il alerté lui-même son pourvoyeur sur cette intrusion, et que devant l’attitude de celui-ci, il l’aurait liquidé pour ne pas être inquiété. Tant qu’on n’avait pas identifié ce dernier, logé et « interviewé », on ne pouvait exclure cette éventualité ou toute autre possibilité en rapport avec le crime organisé. Éléonore en convint.
Alors qu’ils sortaient de la salle, une « je-ne-sais-quoi » la poussa à lui demander si rien ne l’avait titillé durant la réunion. Interprétant la question sous forme humoristique, il lui répondit :
Elle n’insista pas. Il devait préparer l’audition vidéo de la première madame Beisse. Il leur restait une demi-heure avant la connexion. Ils dressèrent un listing des questions à lui poser.
D’entrée, avant même qu’ils ne commencent l’interrogatoire, elle leur fournit un alibi en béton armé : elle n’avait pas bougé de St Paul-de-Vence où elle avait assisté à un dîner donné par la municipalité. Elle trouvait cela naturel et nécessaire, car si elle avait été flic, elle se serait mise en numéro un sur la liste des suspects, juste avant Héléna, au bénéfice de l’âge. Comme sa veuve, elle leur avoua sans fausse honte qu’elle était heureuse que cet enfoiré soit mort.
Ceci établi, la discussion, comme avec la dernière madame Beisse, se transforma en confession. Ils la laissèrent se vider.
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Récit de Maryvonne Sylvestre
Nous nous sommes rencontrés à Science-Po où nous suivions le même cursus. Il venait de son Sud, d’un milieu très pieux. Paris, ville ouverte à tous les plaisirs, lui apparaissait comme un lieu de perdition, les Sodome et Gomorrhe à éviter à tout prix. Le milieu estudiantin de cette période avait, au minimum, des mœurs très libres ; il s’y sentait totalement étranger. Son air constant de chien battu m’a fait pitié et je l’ai en quelque sorte pris sous mon aile. Derrière cette façade de cocker, l’homme était brillant ; et bien que je n’aie jamais partagé ses idées politiques, son ambition, ses idéaux (étais-je naïve…) et son esprit m’ont séduite. Aujourd’hui encore je ne sais pas s’il m’a aimée ou s’il m’a utilisée.
S’il m’a conquise intellectuellement, charnellement, je l’ai déniaisé. Non seulement il ne connaissait rien de l’amour physique, mais il était totalement coincé. La responsabilité en incombait à son éducation très puritaine où régnait l’omertà sur tout ce qui avait un rapport avec le sexe. À la fin des années 80, conserver son pucelage à 23 ans relevait du miracle. Nous avions tous, filles et garçons, une vie sexuelle intense et insouciante. Quand il me raconta que sa mère, l’ayant surpris à 16 ans à se masturber devant les femmes en sous-vêtements du catalogue de La Redoute, l’avait forcé à se flageller à genoux devant un Christ en croix, j’hallucinai, mais je compris mieux son mal-être.
La première fois où je le convainquis de me faire l’amour, ce fut une catastrophe. Déjà il se montra plus que réticent, arguant que forniquer en dehors des liens sacrés du mariage relevait du péché mortel. Je réussis tant bien que mal, après quelques Martini, à l’attirer dans ma chambre en cité U. Je voulais qu’il découvre mon corps en le dénudant. Il le fit avec maladresse et précipitation. Il ne put cependant résister à l’attrait de mes charmes. Je n’étais pas la mémère que je suis devenue aujourd’hui. La tendresse n’était pas vraiment au rendez-vous : il pétrit durement mes seins, ses doigts visitèrent ma vulve brièvement avant de se retirer comme si le feu de l’enfer les avaient brûlés. Lorsque je le déshabillai à son tour, je m’aperçus que la messe était dite : l’état de son slip – un kangourou pur et dur – m’apprit qu’il avait déjà éjaculé.
Cela ne m’arrêta pas et j’entrepris de le prendre en bouche. Sans mal, je dois dire, vu la taille de son membre ; mais malheureusement sans aucune efficacité. J’avais beau sucer, téter, lécher, son membre conservait une flaccidité inquiétante. Il me repoussa soudain, me traitant de fille de Sodome et me gifla. Un aller-retour qui n’avait rien de la baffe amicale. Comme par miracle, sa verge se redressa. Il me sauta dessus et, continuant de m’insulter, me baisa sauvagement. Ce salaud me procura un orgasme incroyable.
Avec du recul, je me rends compte que je me suis montrée stupide, mais à l’époque… je n’avais fait l’amour qu’avec des gentlemen qui baisaient en toute orthodoxie, ennuyeux au possible. Avec lui, je découvrais l’amour vache. J’aimais ça. Du moins dans un premier temps. S’il se comportait comme une brute sadique dans les jeux du sexe, par ailleurs – vous le savez puisque vous avez parlé avec Héléna – je ne pouvais rien lui reprocher. Il se montrait prévenant, charmant, brillant, parfois généreux. J’étais fière de me montrer avec lui, fière de son ascension. Mon entourage me congratulait. Tout baignait, même si parfois je devais cacher mes bleus sous du fond de teint. Intelligent, il ne m’a jamais frappée au visage ; à moins que ça ne l’ait pas intéressé.
Au bout de quelque semaines il ne voulait plus de ma vulve, beaucoup trop accueillante à son goût. Je ne vous dirai pas les comparaisons plus humiliantes les unes que les autres qu’il a faites. En résumé, mon sexe ressemblait à un hangar pour avions. Il décida donc de me sodomiser. Je n’étais qu’une pute, je ne méritais que ça. Je n’avais pas vraiment de goût pour cette pratique mais j’acceptai. Je m’expliquais son désir par la petitesse de son membre : il devait réellement flotter dans mon vagin. L’étroitesse de mon fourreau anal le rassurait sur sa virilité. Naïve que j’étais ! Après trois ans de mariage, il ne me pénétrait plus avec son pénis. Par contre, il avait beaucoup d’imagination quant aux objets que mon anus pouvait absorber.
Entre-temps, sa brutalité, son sadisme avaient explosé. Les gifles et les insultes ne lui suffisaient plus. Pour qu’il parvienne à un semblant d’érection, il fallait que je souffre de plus en plus. Il me reprochait son impuissance. S’il ne parvenait pas à avoir d’érection, la responsabilité m’en incombait. Alors pour me punir j’ai eu droit à toute la panoplie SM : les liens, le fouet, les pinces, et la liste n’est pas exhaustive. La croix de St André, son dernier vice. S’il n’était pas content de moi (et il trouvait toujours une raison), il me crucifiait, nue, les seins écrasés, la vulve et l’anus obstrués par des artefacts divers. Puis monsieur partait à la chasse (parce que ce gros dégueulasse y taquinait le perdreau) et me laissait ainsi des heures. Cette ordure m’avait, moi la femme libérée, asservie. Je me faisais honte, mais si je n’avais pas ma dose de douleur, je ne décollais plus.
Puis un jour, je n’ai plus pu… J’atteignais la quarantaine. Pour lui, j’avais abandonné mon travail, j’avais renoncé à être mère (monsieur étant stérile), j’étais devenue son esclave sexuelle, la chose qu’il pouvait torturer à loisir sans crainte des retombées. Je l’avais aimé passionnément, mais là, je le haïssais. Je me haïssais pour ce qu’il avait fait de moi. Je haïssais aussi le politicien véreux qu’il était devenu. Je me devais de réagir. Alors j’ai installé une caméra et j’ai filmé ses exactions. Ensuite, après en avoir déposé une copie en lieu sûr, je lui ai imposé le divorce à mes conditions. Je pouvais casser son image, ruiner sa carrière ; il n’avait pas le choix.
Presque dix ans se sont écoulés, et je me reconstruis encore. Aucun homme ne m’a touchée depuis, et je ne suis pas encore prête à faire confiance à un mec au point de coucher avec lui.
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Dimanche soir : appartement Tom Jaude. Épisode 1 : on parle
Cette connexion ne leur apporta rien, sinon d’éliminer un suspect potentiel. Elle leur permit, en outre, d’affiner le profil de Beisse qui s’affirmait de plus en plus comme un pervers de longue date. Les propos de Maryvonne Sylvestre sur son enfance pouvaient expliquer en partie ses déviances. Mais comme Tom l’avait souligné, elles ne les excusaient pas pour autant. Elles ne justifiaient en rien toutes les saloperies, toutes les magouilles auxquelles il avait participé dans sa vie publique. Il était aussi pourri à l’intérieur qu’à l’extérieur.
Éléonore rejoignait l’avis d’Héléna : son meurtrier avait accompli acte de salubrité publique, sauf que son taf imposait qu’elle le découvre et le mettre à l’ombre. Savoir que le député méritait ce qui lui était arrivé ne les avançait guère dans leur enquête ; cela allongeait seulement le nombre de suspects potentiels. Pour lui remonter encore un peu le moral, Tom souleva un nouveau lièvre : il avait rencontré sa première femme en 88, s’était marié en 90 avec déjà tous ces travers. N’avait-il pas abusé d’autres femmes ?
Éléonore et Tom discutaient ainsi alors qu’ils se rendaient à l’appart de ce dernier. Ils avaient échangé la Clio de service contre la vieille Range Rover de Tom. Ils s’étaient arrêtés chez un Thaï pour acheter à manger. Ni l’un ni l’autre n’avaient des talents culinaires particuliers, mais ils n’avaient eu aucune envie de se faire un resto. Ils avaient envie de se retrouver seuls et au calme.
Tom louait un petit logement en banlieue dans le 93 dont le seul avantage était d’avoir un garage communiquant directement avec le hall de l’immeuble, ce qui lui évitait de se faire taguer sa voiture (il ne pouvait décemment pas espérer qu’on vole son tas de ferraille), et surtout de ne pas avoir à chercher une aléatoire place de parking.
Tom lui fit visiter. Si la visite fut rapide, cela n’avait rien d’un T5 ; l’appartement était nettement plus grand que le sien et possédait une chambre d’amis pour un loyer moindre. Dans le 9-3, les prix n’étaient pas ceux pratiqués à Paris intra muros, et une baraque comme lui ne risquait pas vraiment d’être agressé. Ironie du sort : avec le déménagement rue du Bastion, il se trouvait à moins d’une demi-heure de la PJ.
Une pensée inepte la traversa avant de s’enfuir en courant : « Si on se met en couple, je veux bien venir habiter ici. » Elle se morigéna pour sa stupidité. Ils avaient passé une nuit ensemble ; et alors ?
Elle fut agréablement surprise par la bonne tenue et l’ordre, certes sommaire, qui y régnait. Tom se dispensa de lui dire qu’il avait fait du rangement et chassé la poussière en prévision de son éventuelle venue. Sauf qu’obnubilé par son désir de lui plaire, planant sur son petit nuage amoureux, il avait oublié un léger détail : Riquebit était une femme et un flic, et une femme comme un flic, ça fouine !
Tom s’éclipsa pour satisfaire un besoin urgent. Déambulant dans la pièce qui servait de salon, elle s’intéressa particulièrement à une table basse où régnait un désordre qui ressemblait fort au sien. Elle examina un bouquin qui comme par hasard traitait de criminalité, replaça un sous-verre qui menaçait de s’écrouler. Son regard fut attiré par une pile de revues sur le plateau de rangement sous la table. Alors qu’elle en prenait une, elle aperçut un laptop sommairement dissimulé. Elle aurait dû reposer la revue et passer à autre chose, mais un flic reste un flic. Pourquoi Tom avait-il planqué cet ordi ? Que voulez-vous qu’elle fît ? Elle l’ouvrit. D’abord elle s’esclaffa : « Pour un flic, laisser son code sur un post-it collé à l’écran, c’est trop fort ! » Elle cessa presque immédiatement de rire. Cela ne ressemblait pas à l’homme qu’elle connaissait, prudent et suspicieux, doté de surcroît d’une excellente mémoire. Cela augmenta ses soupçons. Il ne devait pas lui appartenir.
Elle fit ce qu’aurait fait n’importe qui : elle lança la bécane et tapa le code, code compliqué d’ailleurs. L’ordi était en veille ; l’écran d’accueil apparut immédiatement. Ce quelle y vit la cloua sur place. À ce moment, Tom entra dans la pièce.
Il voulut récupérer le portable mais elle l’empoigna avant qu’il ne l’atteigne. Chacun d’un côté de la table prêt à bondir pour ne pas se faire attraper, la situation évoquait certains jeux d’enfants et, en d’autres circonstances, eût pu être comique.
Tom restait muet. Un silence lourd de menace s’instaura. Soudain, elle eut une illumination :
Il comprit qu’il ne pourrait pas tergiverser. Il aurait déjà eu du mal à se justifier, à inventer une fable plausible face à un interlocuteur lambda ; mais face au commandant Riquebit, c’était peine perdue. Il lâcha l’ordi, alla s’asseoir à la table de la kitchenette, soupira et prit sa tête entre ses mains, résigné.
Comprenant qu’elle avait la situation en main, elle posa la bécane sur la table et s’assit à son tour.
Il posa la main sur la sienne. Malgré la gravité de l’instant, elle ne put s’empêcher d’être émue par cette grosse main qui emprisonnait la sienne.
Il soupira bruyamment, s’empara de son autre main, les rejoignit et les pressa entre les siennes. Il planta son regard dans le sien.
Il avait raison, elle risquait gros mais elle le voulait. Ce mâle alpha si bêta la mettait dans tous ses états. Elle ne s’était jamais sentie autant démunie.
Elle interpréta mal ses propos et voulut l’embrasser. Il se leva précipitamment.
Il sortit deux verres et une bouteille de Jura Prophecy à moitié vide du placard mural et les apporta dans la partie salon. Il leur servit à chacun une dose pour adulte pendant qu’elle s’asseyait dans le canapé.
Cet intermède plus léger ramena un peu de sérénité sur les traits de Tom.
Il s’envoya une bonne lampée et entama son récit :
Il s’empara de nouveau de sa main. La cuisse accolée à la sienne déclenchait l’émoi dans son bas-ventre. Ce n’était pas le moment, vraiment pas le moment.
Dans un mouvement de tendresse incontrôlable, elle se lova contre lui, lui caressa le visage, et dans un élan spontané leurs lèvres se joignirent. Un baiser brûlant sans concession, passionné, exprimant leur tension. Leurs dents s’entrechoquaient, leurs langues se livraient un combat de titans. Il avait passé une main sous son pull et lui imposait une caresse tendrement brutale. Ce contact rugueux sur sa peau nue l’embrasait.
Il avait déjà dégrafé son soutif et malaxait un sein, en excitant un téton du bout du pouce. En se tortillant, elle parvint à poser une main sur son pénis. Elle constata, non sans plaisir, que le souci ne l’empêchait pas de réagir à ses charmes. Elle voulut déboutonner le jean. Ce geste le fit réagir. Il se reprit et la repoussa.
Elle se blottit contre lui.
Il s’interrompit brièvement le temps de vider son verre. Riquebit n’avait pas encore touché au sien.
Tom mima les guillemets.
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Dimanche soir : appartement Tom Jaude. Épisode 2 : on baise
Il la bâillonna avec ses lèvres. Éléonore opposa un semblant de résistance avant de donner libre accès à cette langue et de répondre à son baiser. Retrouvant un semblant de lucidité, elle voulut se détacher. Une main plaquée sur sa nuque l’en empêcha. L’autre dans son dos tentait de s’insinuer sous son pantalon. Abandonnant toute résistance, elle défit ceinturon et braguette afin de lui faciliter le passage. La main ainsi libérée envoya le majeur en reconnaissance dans l’étroite vallée culière. Ses compagnons s’appuyaient sur les deux lunes, pouce et index, le droit, annulaire, auriculaire, le gauche facilitant son avancée.
Sous cette attaque éclair, son bras se trouva coincé contre le torse de Tom, sa main, par un heureux hasard, reposant sur la braguette du jean. Elle ne pouvait ignorer cette colonne de chair qui gonflait et se raidissait progressivement. Bonne âme, elle ne pouvait la laisser s’asphyxier dans un espace si étroit, aussi elle entreprit de lui donner de l’air. Opération un peu compliquée dans sa position. Elle dut demander de l’aide à sa main gauche. Aide des plus efficaces puisqu’elles délivrèrent un membre qui se redressa fièrement.
Elle réalisa soudain que son pantalon ainsi que sa culotte pendouillaient au-dessus de ses genoux. Son tee-shirt, dans une remontée brutale, suspendit leur baiser pendant quelques courtes secondes. Le soutien-gorge échoua contre son bras, retenu par une seule bretelle. Les lèvres de Tom, délaissant les siennes, vinrent flirter avec ses seins, tétant, baisouillant, mordillant, passant d’un globe à l’autre pour éviter toute jalousie.
Submergée par cette attaque éclair, elle ne pouvait qu’abdiquer toute résistance. En signe de reddition, une main toujours amarrée à la bite en érection, elle peignait tendrement la chevelure en broussaille de son assaillant. Celui-ci en se tortillant parvint à virer ses boots et son jean puis fit de même avec les godasses (à lacets !) et les fringues surnuméraires de sa coéquipière. Pour ne pas être en reste, elle l’aida à ôter son tee-shirt et en profita pour éjecter son soutif, accessoire devenu inutile.
À la fin de cet épisode vestimentaire, il la souleva, la prit dans les bras et se dirigea vers la chambre.
Il fallait qu’elle retrouve son sang-froid.
Riquebit éclata de rire.
De nouveau, il la fit taire par un baiser. Technique efficace. Il la posa délicatement sur le lit, s’allongea à ses côtés sans cesser de l’embrasser. Une main exploratrice s’insinua entre ses cuisses pour se poser sur son sexe humide. Paume ouverte, elle amorça un lent massage, le majeur en crochet pénétrant sa fissure génitale. Éléonore, malgré le bien-être provoqué par cette gâterie, ne parvenait pas à décoller. L’anxiété qui la rongeait ne l’empêchait pour autant pas de soigner, par de savants attouchements, la raideur inquiétante du phallus qui soubresautait contre sa paume. Aussi lorsque Tom, libérant sa bouche, s‘appliqua à stimuler, du bout des lèvres, ses tétons, elle ne put se retenir.
Un borborygme incompréhensible lui répondit. Elle continua.
Et il retourna à l’activation de ses tétons. Il obtenait un certain succès : le droit comme le gauche bandaient généreusement. Le majeur tournicotait dans une vulve de plus en plus humide. Un temps, il crut qu’Éléonore lâchait l’affaire. Basculant sur le lit, elle avait amené la tête entre ses cuisses et lui léchait les boules alors que sa main s’employait toujours sur sa bite. De fait, sa tête se trouvait face à un mont de Vénus lisse. Ses lèvres s’y posèrent, légères. Sa main restait toujours plaquée contre le sexe avec un majeur, rejoint entre-temps par un index tout aussi fouisseur, profondément enfoncé. Au saut de carpe qu’elle accomplit, il pensa que c’était gagné. Que nenni ! Elle cogitait. Soudain, elle s’exclama :
La langue de Tom stoppa à quelques millimètres d’un clito pourtant attirant. Il releva la tête, prit appui sur un coude.
Tom, soudain plus attentif, stoppa net sa masturbation.
Durant leur échange, le majeur bien humectée s’était aventuré dans la vallée étroite et avait forcé sans grande difficulté l’entrée de secours.
Tom ricana avant de replonger tête la première entre ses cuisses. Le clito qu’il avait lâchement abandonné lors de sa dernière intervention intempestive, cette fois ne put échapper à une langue gourmande et affûtée. Elle le lécha délicatement, de la pointe tournicota autour de lui, s’inséra entre les lèvres gonflés pour visiter sa vulve. Le majeur toujours placé dans l’étroit conduit en explorait les parois en de lents mouvements ondulants, remontant parfois à la surface pour se réapprovisionner en cyprine fraîche.
Éléonore, maintenant libérée de tout souci, s’abandonnait sans état d’âme. Elle avait embouché la bite, qui durant cet intermède s’était un tant soit peu ramollie. Elle la lutinait du bout de la langue tout en faisant rouler les boules entre ses doigts sans grande conviction, trop concentrée sur la montée de son propre plaisir. Ce lustrage d’entretien, combiné à l’autoexcitaion créée par la dégustation des caresses qu’il lui prodiguait, avait suffi à rendre toute sa fermeté au pénis de son amant. Lorsqu’il captura le petit encapuchonné entre ses lèvres et le suçota, elle explosa dans une jouissance jubilatoire.
Au moment où Tom s’apprêtait à la chevaucher, elle le repoussa brutalement.
Jetant un œil à son compagnon, elle constata que sa virilité était en berne.
Tom voulut reprendre la partie, mais en rigolant elle lui dit qu’elle était crevée et que c’était sa punition pour avoir baisouillé Alexandra Delit. Malgré qu’il se soit fait jeter, Tom s’endormit rapidement, emplissant la chambre de ronflements sonores. Éléonore eut beaucoup plus de mal à trouver le sommeil. Elle avait l’habitude de dormir seule, et le moteur d’avion qui tournait sur sa droite ne l’aidait guère. Ils avaient résolu le problème de l’ordinateur. Le risque que Mabel mette en doute leur sincérité était inexistant. Leur enquête n’avançait pas. Elle avait toujours ce sentiment d’avoir raté quelque chose lors de leur briefing avec Michel. Elle se repassa vainement la scène en boucle avant de finalement s’endormir.
À suivre