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Temps de lecture estimé : 21 mn
24/10/14
Résumé:  De nouveau prisonnier, je participe à la mutinerie désespérée des détenus.
Critères:  hsoumis trans 69 pénétratio aventure sf -sf
Auteur : Gufti Shank  (Bragon)            Envoi mini-message

Série : Dégénérescence

Chapitre 04 / 08
La révolte

Résumé des épisodes précédents : J’ai complètement perdu la mémoire, et me retrouve plongé dans un monde étrange peuplé d’hermaphrodites à l’allure féminine, qui me considèrent comme dégénéré parce que pourvu d’un seul sexe. J’ai rencontré Alys, dégénérée comme moi, qui m’a offert un refuge temporaire chez sa maîtresse, Dame Heline. Mais les dégénérés mâles sont interdits en ville, et j’ai été capturé et enfermé dans la prison de Tal-Mania, où j’ai fait la connaissance de Kalmin, un homme également prisonnier. Je suis bientôt tiré de là par Dame Heline, puis par Dame Mazela, qui me « louent » pour égayer des soirées bourgeoises, au cours desquelles je suis drogué d’une potion de vigueur. Découvrant l’état déplorable dans lequel le poison m’a plongé, ma belle Alys devient folle et tue Mazela. Elle est alors emprisonnée à son tour dans la prison de Tal-Mania et Dame Heline, qui est parvenue à me soustraire aux surveillantes lors de l’arrestation de sa servante, veut que j’y retourne moi aussi pour aider cette dernière à s’en enfuir. Voir récits n° 16432 , 16444 et 16452 .




***





La geôlière qui avait ouvert l’œilleton nous considéra l’un après l’autre, Dame Heline et moi.



Mais quelques minutes plus tard, la noble hermaphrodite tirait la laisse dont elle m’avait de nouveau affublé, et m’entraînait derrière trois surveillantes dans le dédale de couloirs de la prison de Tal-Mania. Et je la devinais jeter un rapide coup d’œil à travers les grilles de chacune des cellules devant lesquelles nous passions.



Je n’avais encore jamais entendu ce terme. Ainsi c’était comme ça que ces créatures se nommaient entre elles… Une fois de plus, je fus envahi d’un fort sentiment d’indignation, mais je maîtrisai ma colère en pensant à la décharge électrique que je ne manquerais pas de recevoir si je donnais mon opinion.



Je me laissai guider jusqu’à une nouvelle cellule où je fus poussé sans ménagement. Une cellule vide, dans un quartier que je ne connaissais pas, mais qui ressemblait à celle où j’avais déjà séjourné et où j’avais rencontré Kalmin. Ma laisse ne me fut ôtée que lorsque la grille claqua derrière moi. Dès que les surveillantes se furent éloignées, je cherchai à capter l’attention de l’un ou l’autre des détenus des cachots voisins, mais les pauvres diables semblaient tellement abattus et épuisés qu’ils ne réagirent qu’à peine quand je leur demandai où étaient détenues les femmes.




***




Le second jour de mon retour à Tal-Mania, une certaine Dame Sohane demanda à me faire sortir de ma geôle. Moyennant sans doute plusieurs milliers de curins, elle fut autorisée à profiter de mon corps de dégénéré pendant quelques heures, comme d’autres l’avaient fait avant elle. Mais cette demoiselle de la grande société, à la différence des précédentes, n’avait pas voulu me conduire dans la ville haute ; elle avait seulement souhaité pouvoir disposer d’un endroit tranquille.


Et je compris en la voyant : les traits gracieux qui ornaient avec finesse son beau visage étaient presque ceux de la maîtresse d’Alys ; cette Dame Sohane ressemblait à s’y méprendre à Dame Heline. C’était vraisemblablement sa sœur, ou peut-être sa demi-sœur.



Elle ôta d’un geste sa somptueuse tunique, me révélant son merveilleux corps élancé et une impressionnante verge pendante qui venait rompre brutalement l’enchantement de sa silhouette.



Mais elle m’avait fait un clin d’œil, j’en étais sûr ! Je m’exécutai, et approchai d’elle à quatre pattes. Elle referma ses mains sur mes cheveux, et plaqua vivement mon visage sur son entrejambe, sur sa grosse bite que je sentais se gonfler.



À peine avais-je réalisé ses paroles qu’elle me gifla avec violence, me faisant tomber en arrière. Saisissant sa queue, elle m’enjamba et vint s’asseoir à califourchon sur mon torse, puis elle releva ma tête de son autre main et la pressa contre son sexe durcissant.



J’entrouvris les lèvres, et le gros pénis tendu s’enfonça à plusieurs reprises profondément à l’intérieur de ma mâchoire disloquée. Je manquais presque d’étouffer tandis que ma partenaire inconnue gémissait avec un apparent plaisir. Cela fut bref, heureusement, et l’hermaphrodite se retourna bientôt pour s’allonger tête-bêche par-dessus moi, écrasant ses testicules contre mon menton et pressant sa fente sur ma bouche et mon nez. Et alors que je mis à la lécher, je sentis qu’elle refermait ses lèvres autour de mon gland.


Et dès que ses gémissements, son sexe ruisselant, et ses caresses expertes m’eurent fait suffisamment d’effet, elle se tourna de nouveau et me chevaucha pour cette fois-ci s’empaler d’un mouvement sur ma hampe rigide, et balancer son bassin au-dessus de moi. Les yeux fixés alternativement sur sa belle poitrine et sur son incroyable verge, je savourais en soupirant de plaisir les va-et-vient que la jolie blonde imprimait.



J’obtempérai.



Souriant malgré moi, je refermai une main entre nos deux corps autour de la verge gonflée de ma partenaire hermaphrodite, et passai mon autre main derrière ses fesses pour diriger un doigt inquisiteur le long de sa raie jusqu’à son anus.



Et tout en balançant un grand coup de bassin et en masturbant vivement sa grosse queue, j’enfonçai franchement mon majeur dans l’arrière-train de la demoiselle.



Presque amusé, je me forçai à gémir comme elle me l’avait demandé. À l’évidence, elle était envoyée pour me parler.



J’avais raison, c’était bien la sœur de Dame Heline. Elle se redressa et glissa sa main gauche sur son bas-ventre, à côté de la mienne, et plaqua la droite sur mon visage, enfonçant trois doigts dans ma bouche.



Dame Sohane arborait un rictus effrayant, et je cessai tout soudain de sourire pour serrer les fesses malgré moi, pour l’évident plaisir de ma partenaire à son tour amusée. Elle se pencha de nouveau pour chuchoter encore :



Mes yeux animés roulèrent sous les siens, et je m’agitai pour lui répondre ; elle retira ses doigts de ma bouche.



Je fermai les paupières et me crispai de rage. Dame Sohane, au-dessus de moi, se déhanchait de plus en plus, et frottait sa verge contre mon bas-ventre.



J’écumai de dépit et de rage, tout autant que d’envie d’agir.





***




Ce fut le troisième jour que tout se produisit. Kalmin, presque mourant, avait décidé de mettre son plan à exécution, comme une sorte de dernière volonté, un dernier acte de bravoure. Ce dont il m’avait parlé à plusieurs reprises, une émeute générale lors de la corvée des eaux. Et certains d’entre nous auraient sans doute le temps de desceller et franchir la grille d’évacuation.


Vers ce qui devait être le milieu de l’après-midi, les dégénérés des cellules paires furent traînés partiellement enchaînés jusqu’à la salle des niveaux inférieurs de la corvée des eaux : la profonde et vaste caverne où j’avais déjà dû participer au nettoyage et au tri des déchets issus des eaux usées de la grande cité d’Avila.


Sous les coups et les invectives d’une dizaine de surveillantes armées, plus de cinquante détenus s’affairaient, les mains dans le flot tempétueux et nauséabond. Kalmin cherchait du regard plusieurs autres prisonniers. Il ne m’avait pas prévenu de ce qu’il comptait faire précisément, et m’avait juste dit au milieu d’horribles quintes de toux que c’était le grand jour.


Et il hurla soudain en se ruant sur la surveillante la plus proche, la ceinturant et la déséquilibrant. Et plusieurs autres détenus, à son signal, l’imitèrent, se jetant sur les gardiennes qui les entouraient. Mais celles-ci avaient réagi avec célérité, et de nombreuses flèches jaillirent à travers la caverne, atteignant presque à chaque fois mortellement l’un ou l’autre d’entre nous.


Je me précipitai à mon tour à l’aide de Kalmin ; la surveillante qu’il avait assaillie reprenait déjà le dessus et était parvenue à s’emparer d’un grand poignard qu’elle devait cacher quelque part sous l’épaisse tunique qui lui servait d’uniforme. Le détenu, fatigué et malade, ne retenait qu’avec peine le bras armé. Avec la faible amplitude que me permettaient les chaînes à mes chevilles, j’assenai deux rapides coups de pied à la tête de notre ennemie, et elle perdit connaissance. Je voulus aider mon compagnon de cellule à se redresser, mais il n’était déjà plus qu’un cadavre : une flèche dépassait de son flanc, et une longue estafilade sur son torse répandait du sang sur le corps inanimé de la surveillante.


Tout cela n’avait duré que quelques secondes. Je relevai rapidement la tête, pour faire le point sur la situation. Une vingtaine de prisonniers étaient étendus sur le sol, abattus. Presque la moitié d’entre nous. Plusieurs autres luttaient encore. Plus loin, vers le haut de la pièce, deux vigiles ajustaient leurs arcs. L’une me visait, à l’évidence. Je me jetai à terre, m’abritant derrière les corps de Kalmin et de sa victime.



C’était la voix d’un homme, un détenu. Je regardai vers lui : il tendait la main. Suivant son geste, j’aperçus plus loin encore une autre gardienne courir vers la sortie de la caverne, sans doute pour donner l’alarme. À côté de celui qui avait crié, un second prisonnier banda un arc qu’il avait dérobé à l’une des surveillantes terrassées. Sa flèche partit une fraction de seconde avant qu’il ne soit lui-même abattu de deux traits en plein torse, mais son coup avait porté : celle qui tentait de s’échapper était touchée.


Je devais agir moi aussi. Trois « femmes » étaient encore debout, et nous tiraient l’un après l’autre comme des lapins. Me cachant de nouveau des tirs, j’extirpai les armes de la surveillante coincée devant moi sous le corps de Kalmin. Et repoussant les deux cadavres, je parvins à me saisir de quelques flèches en os. Me levant à découvert, j’armai l’arc et ajustai une cible, mais je me jetai presque aussitôt sur le côté en apercevant l’une des autres gardiennes me mettre en joue.


Couvrant les hurlements, un puissant sifflement aigu s’éleva ; c’était la diablesse qui avait couru pour s’en aller donner l’alarme : blessée, elle trouvait encore quelque force pour porter à ses lèvres un petit sifflet sans doute destiné à alerter de nouvelles vigiles. Mais le bruit strident désempara les trois surveillantes toujours valides, qui tournèrent la tête en arrière un court instant. Et, profitant de ce bref répit, je bandai mon arc et lâchai une flèche sur l’une d’elles.


J’avais hélas largement préjugé de mes compétences de tir. Mon projectile heurta le roc de la paroi à plus de deux mètres de ma cible, qui, déjà, se préparait à riposter. Mais un autre détenu eut davantage de succès, et la surveillante hurla quand une flèche lui perça le ventre. Elle s’écroula en arrière tandis que plusieurs autres prisonniers se relevaient soudain pour lancer en beuglant tout ce qu’ils avaient sous la main et charger les dernières gardiennes survivantes aussi vite que le leur permettaient leurs chaînes.


Sans doute inquiétées par la violence subite de cette ultime attaque, nos geôlières encore valides firent volte-face pour s’en aller en hâte par la galerie d’accès à la grande caverne.



L’homme qui avait parlé arborait un large sourire.



L’un après l’autre, en quelques secondes, nous fûmes débarrassés de nos entraves. Attendant mon tour, je regardai tout autour de moi. La victoire était bien terne. Tout au plus étions-nous une dizaine de survivants. Une quinzaine si l’on comptait les quelques malheureux qui agonisaient en geignant.



Les premiers hommes à être libérés s’étaient déjà rués à l’assaut de l’épaisse grille qui barrait notre issue.



Notre seule chance de survie était de parvenir à desceller les barreaux. Se jetant à travers le flot des eaux sales qui dévalait dans l’obscurité béante derrière la herse, mes compagnons de révolte attaquaient de toutes parts ses contreforts. Enfin libre, je me joignis à la mêlée et saisis à mon tour un barreau pour le secouer vivement. Kalmin avait raison : la grille n’était pas bien solide.



Mais suffisamment vite ? Plusieurs d’entre nous lançaient à tout moment des regards en arrière, inquiets de voir revenir les geôlières.



Et dans un râle collectif, nous en vînmes à bout. La grille avait cédé d’un côté, laissant suffisamment de place pour passer l’un après l’autre. Déjà deux hommes s’étaient précipités dans le flot sombre en hurlant leur saveur de l’espoir d’une liberté retrouvée.



L’homme avait sans doute raison. Mais je ne m’enfuirais pas sans Alys.



Et il sauta lui aussi. J’étais seul, désormais. Avec en tout et pour tout un long poignard et un arc dont je ne savais pas vraiment me servir. Et un objectif : la cellule 66 du bloc F. Et dans quelques secondes, quelques minutes tout au plus, une armée de surveillantes ferait sans doute irruption dans la grande caverne. Mon unique avantage était finalement d’être seul. J’allais devoir utiliser au mieux le terrain : la vaste grotte était plutôt obscure, et je parviendrai peut-être à me cacher…


Ramassant les clés abandonnées par mes codétenus, je me précipitai sur la rampe qui montait vers le couloir où s’étaient enfuies les gardiennes. J’espérais les entendre arriver si elles devaient revenir ; le bruit de fond de l’eau torrentielle couvrait mes déplacements, mais n’était sans doute pas assez fort pour cacher l’arrivée massive d’une troupe armée.


Mais ce fut un nouveau grand coup de sifflet qui m’accueillit : la surveillante agonisante qui avait déjà donné l’alerte une première fois m’avait repéré et jetait ses dernières forces dans une ultime alarme. En quelques bonds, je fus à côté d’elle et lui arrachai son instrument d’un coup de pied qui lui fit valser la tête. Elle trouva encore l’énergie de la relever quelque peu et m’adressa quelques mots entrecoupés de soupirs de douleur.



Elle ricana en crachant un long filet de sang.



Agacé, j’empoignai la flèche qui dépassait de son flanc et l’agitai doucement. La gardienne hurla en implorant des yeux ma pitié.



Elle pouvait très bien me raconter n’importe quoi.



De nouveau, je remuai la hampe qui sortait de sa blessure ; mais cette fois, la blessée perdit rapidement connaissance. Je ramassai ses clés à tout hasard, pour compléter le trousseau que j’avais déjà, et me préparai à m’aventurer vers les niveaux supérieurs, à la recherche d’Alys.


Je n’avais progressé que d’une vingtaine de mètres dans le couloir ascendant lorsque j’entendis des bruits de pas de course. Et j’eus tout juste le temps de revenir dans la vaste caverne me dissimuler dans l’ombre d’un rocher avant qu’une dizaine de surveillantes n’y fassent irruption, armées et prêtes à combattre.



Et elles descendirent toutes en hâte vers le fond de la grotte, passant à quelques mètres de ma cachette sans imaginer que l’un des détenus pût avoir trouvé refuge ici. C’était trop beau pour être vrai ! J’attendis encore quelques secondes pour me débusquer ; trois gardiennes étaient allées examiner les corps étendus sur le sol, d’autres scrutaient la herse partiellement descellée. Rasant les murs, je me dirigeai le plus silencieusement possible vers le goulet d’accès, et me mis à courir dès que j’estimai ne plus être en vue.


De grosses gouttes de sueur coulaient partout le long de mon crâne, sur mes tempes, sur mes joues, dans mon cou. À chaque tournant du corridor, j’hésitai, écoutai attentivement, puis me débusquai soudain, poignard levé prêt à s’abattre. J’atteignis un premier palier, celui par lequel nous avions été amenés là, celui qui menait à ma cellule. Je devais monter encore. Quelques nouvelles sinuosités, et toujours plus de tension. J’avais peur de me retrouver face à une guerrière en armes.


Au second palier, deux galeries ; j’empruntai celle de droite, la moins éclairée. Plusieurs cachots étaient vides. D’étranges grondements s’élevaient, indistincts. Je continuai d’avancer, prudemment, toujours sur le qui-vive. Dans une geôle, enfin, quelqu’un. Une femme. À demi nue.



Sa voix rauque couvrit un instant les grognements qui paraissaient plus proches.



Je ne savais même pas si c’était vrai, mais je n’avais pas de temps à perdre. D’abord Alys, ensuite on verrait.



La prisonnière m’adressa un geste pour indiquer le fond du couloir. Je lui répondis par un petit signe.



Mais je l’ignorai et m’avançai plus loin dans le passage entre les cellules. Dans une autre, sur la gauche, une masse de chair informe étendue à terre. Je fus pris d’un haut-le-cœur ; et si c’était… Non, ce n’était pas Alys, heureusement. Qu’avait-elle voulu dire ? Ne pas être trop jolie… Les grommellements s’accentuaient tandis que je progressais encore silencieusement. Mais une voix féminine s’éleva soudain :



Et je découvris la scène avec effroi avant même d’avoir eu le temps de me l’imaginer : dans une cellule, attachée nue pendue par les poignets, par des chaînes prises haut dans les barreaux de la grille, Alys, qui paraissait inconsciente, était assaillie par une surveillante qui lui maintenait les hanches et la pénétrait en couinant. Et juste derrière, deux autres, qui ricanaient et attendaient leur tour, en masturbant leurs ignobles verges.


Je ne pensais pas être capable d’un tel accès de violence, mais le spectacle qui s’offrait à mes yeux me rendit fou. Lâchant mon arc, et poignard levé, je me jetai en avant et transperçai brutalement le dos de la surveillante qui se tenait dans la porte de la cellule ouverte. Elle s’effondra en gémissant de douleur et d’incompréhension tandis que j’arrachai l’arme de sa colonne vertébrale, et avant même que les autres aient pu réagir, j’avais sauté par-dessus le corps de ma première victime et assené un nouveau coup de taille en plein flanc à celle qui défonçait ma compagne, et elle s’écroula à son tour.


Il ne restait plus que la troisième, qui avait reculé instinctivement tout au fond de la cellule en dégainant une arme. Mais ma furie était trop forte, trop rapide, et en une fraction de seconde, je plongeai sur elle et la perforai d’un coup d’estoc en pleine poitrine. Crispé, tremblant, je respirai encore par à-coups quelques longues secondes en contemplant avec rage les proies de ma folie. La première agonisait en geignant ; la seconde perdait son sang sur le sol, sa verge stupide pendant à son côté ; la troisième était déjà morte.


Et Alys ne réagissait pas ; elle s’était effondrée comme un pantin accroché à ses chaînes dès que son assaillante l’avait lâchée.



Je m’approchai pour écarter ses longues mèches rousses collées à ses joues.



Elle tressaillit, et ouvrit les yeux.



Elle se redressa pour reprendre appui sur ses jambes et tourner vers moi son visage encore effrayé.



La rage folle dans laquelle je me trouvais toujours décuplait non seulement mes acuités mais également mon optimisme.



Je me baissai pour ramasser les clés sur le corps de la première et mon poignard sur celui de la troisième. Et en moins de vingt secondes, ma compagne fut libre, et s’effondra à genoux. Je la relevai doucement pour l’étreindre un moment. Elle grelottait. J’arrachai la tunique la moins déchirée et ensanglantée d’une surveillante pour la lui enfiler.



Coinçant mon poignard en perçant le tissu de mon jean, je passai un bras sous les cuisses d’Alys pour la porter.



Sans plus un mot, mais toujours pleine d’effroi, elle prit ma main et emboîta mes pas silencieux dans le couloir que j’avais emprunté pour la retrouver.



C’était la femme emprisonnée à qui j’avais parlé un instant plus tôt. À travers les barreaux, je lui tendis les clés volées à la ceinture de la surveillante.



Elle hurla en s’emparant du trousseau et commença nerveusement à les essayer les unes après les autres en tremblotant. J’espérais que ses cris n’allaient alerter personne de plus, mais il semblait que toutes les dernières surveillantes de ce niveau étaient descendues à la grande caverne de la corvée des eaux.



Mais j’avais parlé trop vite : des bruits de course se firent de nouveau entendre. Dans un réflexe, je poussai ma compagne en arrière et sur le côté, contre la grille d’une cellule, et celle-ci, vide, n’était pas verrouillée et s’ouvrit.



Je l’y suivis et fermai la porte derrière nous, tandis que nous reculions dans l’obscurité du cachot. Quatre surveillantes passèrent en courant dans le couloir et s’immobilisèrent quelques dizaines de mètres plus loin, découvrant probablement mon carnage.



C’était la voix de la femme à qui j’avais donné les clés. Elle criait à l’attention des gardiennes qui venaient de nous dépasser.



La fausse piste ne tiendrait sans doute pas longtemps, mais elle laissait à la prisonnière le temps d’essayer de nouvelles clés, et à nous celui de progresser vers notre échappatoire.


Nous parvînmes sans encombre jusqu’à l’entrée de la grande caverne où gisaient toujours les dizaines de cadavres, mais trois surveillantes s’y trouvaient encore, devisant à voix basse près de la grille que j’espérais franchir, arcs prêts à servir. En les apercevant, mon optimisme tomba d’un cran ; les attaquer comme je l’avais fait quelques minutes plus tôt n’était pas envisageable, à peine aurais-je fait quelques pas dans la grotte que je serais repéré et abattu.


Une idée ! Vite ! Coincés comme nous l’étions entre deux feux, nous n’allions pas tarder à être découverts. Je fouillai des yeux toute la pièce et ses éventuelles cachettes. Impossible de rejoindre la grille de sortie sans être remarqués. Tout au plus pourrions-nous atteindre le rocher où je m’étais caché près de la surveillante au sifflet. Oh ! Le sifflet !



En rampant, je me faufilai sur quelques mètres pour ramasser le sifflet d’alarme que j’avais arraché à la sentinelle lorsqu’elle avait voulu s’en servir une seconde fois. Tout allait bien, les trois surveillantes ne regardaient pas dans ma direction. Je reculai jusqu’à ma compagne qui tremblait d’inquiétude, et sans doute encore de froid.



Nous remontâmes de quelques mètres vers le premier palier, jusqu’à trouver un recoin plus obscur qui pourrait convenir pour nous dissimuler tous les deux. La cachette n’était pas excellente, mais avec un peu de chance, elle allait pouvoir suffire. Et en cas de malchance, j’avais toujours mon poignard… Lorsqu’Alys s’y fut blottie, je revins en direction de la vaste caverne et soufflai avec force dans le sifflet d’alarme.


Le son strident allait certainement faire réagir toutes les surveillantes alentour, et nous risquions tout aussi bien d’être découverts par des gardiennes qui redescendraient des blocs supérieurs. Je vins me recroqueviller à côté d’Alys, en ressortant mon poignard, prêt à bondir.


Nous cessâmes de respirer lorsque des pas de course résonnèrent à l’entrée du corridor ; mon plan avait fonctionné : les surveillantes qui gardaient encore la salle se précipitaient vers nous, suivant l’alarme qu’elles venaient d’entendre. Et elles passèrent l’une après l’autre en courant à côté de nous sans nous voir. Nous attendîmes qu’elles se soient éloignées quelque peu avant de nous relever et de marcher furtivement dans l’autre direction. Mais une voix s’éleva soudain derrière moi :



Merde ! Nous étions repérés !



Il n’y avait plus que ça à faire. Courir et espérer atteindre la grille avant d’être rattrapés ou touchés par leurs armes de jet. J’empoignai la main d’Alys et l’entraînai à toute allure vers le fond de la caverne. Nous manquions à chaque pas de glisser sur le sol humide, ou de trébucher sur un des corps qui gisaient un peu partout.



Je jetai un regard en arrière : les surveillantes avaient débouché à leur tour dans la grande salle et ajustaient leurs arcs. Je tirai Alys pour un brusque crochet ; la pauvre, suite à ce qu’elle avait déjà vécu, était à bout de force et chancelait au moindre à-coup. Encore quelques dizaines de mètres jusqu’à la grille. Je soulevai ma compagne et la pris dans mes bras. Une flèche miaula à nos oreilles. Je repartis, courant autant que possible, zigzaguant au beau milieu des cadavres. Alys sanglotait.



Mais un hurlement retentit derrière nous.



Tournant la tête, j’aperçus l’une des gardiennes s’effondrer, tandis que les deux autres faisaient volte-face, apparemment attaquées de l’autre côté. Peut-être était-ce la femme à qui j’avais donné les clés qui était parvenue à libérer plusieurs détenus… Peut-être avaient-ils récupéré des armes… Mais nous n’en saurions jamais rien : j’avais mis à profit cette dispersion pour courir jusqu’à la grille descellée où le flot bruyant s’enfonçait dans les entrailles de la montagne.



Maintenant que nous y étions, ni Alys ni moi n’avions franchement envie de nous jeter dans le souterrain inquiétant.



Elle soupira.



Je me faufilai entre la roche et les barreaux descellés et mis le pied dans le courant tumultueux, manquant de glisser et de dévaler dans le torrent. L’eau était froide et nauséabonde. Je franchis la herse et m’y cramponnai d’une main pour aider Alys de l’autre. Ma compagne m’imita mais dérapa aussitôt sous la force du flot. Je l’attrapai in extremis par le bras et la remontai difficilement pour la serrer un dernier instant contre moi.



Larmoyante, elle acquiesça. Et je lâchai la grille.